Feuille de route de la CES pour l'avenir de l'Europe

Feuille de route de la CES pour l’avenir de l'Europe

Résolution adoptée par le Comité exécutif de la CES lors de la séance des 13-14 juin 2017

 

Contexte

 

Le 1er mars 2017, le président de la Commission européenne a lancé une réflexion sur l'avenir de l'Europe, avec la participation des 27 États membres après le Brexit, en publiant un livre blanc suivi d’une série de documents de réflexion.

En avril et mai 2017, divers documents de réflexion sur la dimension sociale de l’Europe, la maîtrise de la mondialisation et l’approfondissement de l’UEM ont été publiés, tandis que d’autres textes relatifs aux finances de l’UE ainsi qu’à la sécurité et la défense seront diffusés dans les mois à venir.

Le 26 avril 2017, la Commission européenne a publié une série de documents afin d’établir un pilier européen des droits sociaux, en intégrant dans le processus deux premières phases de consultation des partenaires sociaux en vertu de l’article 155 du TFUE.

Le 25 mars 2017, les Premiers ministres et chefs d’État des 27 pays de l’Union se sont réunis à Rome à l’occasion du 60e anniversaire du Traité de Rome et ont signé la déclaration de Rome sur l’avenir de l'Europe.

Pour s’engager activement dans cette démarche, la CES a adopté sa propre plate-forme sur l’avenir de l'Europe (ici) résumant les analyses et propositions syndicales afin de construire une Europe meilleure et plus sociale pour les travailleurs.

La plateforme de la CES est fondée sur des positions et des résolutions adoptées antérieurement telles que le Manifeste du Congrès de Paris, le document Stratégie et Plan d'action de la CES, le plan d'investissement de la CES intitulé « Une nouvelle voie pour l’Europe », le protocole de progrès social ou enfin le Plan d’action de la CES, donnant suite aux priorités fixées lors du Congrès.

La Déclaration de Rome de la CES (ici) a été adoptée lors de la conférence à mi-mandat tenue du 29 au 31 mai à Rome. Ce document livre une analyse approfondie des récents développements en Europe et définit cinq priorités principales :

  • Des investissements pour une croissance durable et la création d’emplois de qualité ainsi que des services publics de qualité.
  • Des hausses de salaires et la convergence des salaires vers le haut, grâce à une négociation collective plus poussée, au dialogue social et à la participation des travailleurs.
  • Une transition juste vers une économie à faibles émissions de carbone, une numérisation et une automatisation durables, une mondialisation équitable, un agenda commercial progressiste et l'avenir du travail.
  • Une Europe plus sociale et davantage de droits sociaux, grâce à un pilier européen des droits sociaux fort qui améliore la vie des travailleurs et à un protocole de progrès social.
  • Une action visant à lutter contre le dumping social et salarial et à parvenir à un traitement et une intégration équitables, par le biais d'une mobilité et d'une migration équitables au sein d’un marché intérieur juste.

La Déclaration de Rome de la CES demande aussi que les Institutions européennes soient plus démocratiques, transparentes, responsables et efficaces. En effet, les travailleurs et les citoyens européens veulent savoir que leur voix est entendue par les décideurs et que la gouvernance européenne et nationale peut être influencée par eux.

Sur la base de ces documents, le comité exécutif adopte (est appelé à adopter) la feuille de route de la CES pour l’avenir de l’Europe, qui définit une série d’actions afin d’atteindre les objectifs liés aux principales priorités précitées et d’examiner les initiatives lancées par les institutions européennes.

Ces actions sont décrites plus en détail dans les positions et résolutions spécifiques adoptées par le comité exécutif. Cette feuille de route constitue un résumé ayant pour vocation de dresser le portrait global de la stratégie de la CES pour l’avenir de l'Europe.

 

Des investissements pour une croissance durable et la création d’emplois de qualité ainsi que des services publics de qualité.

 

  1. Obtenir de plus solides investissements publics et privés pour la création d’emplois de qualité en relançant le plan d'investissement de la CES « Une nouvelle voie pour l’Europe »[1] et négocier des améliorations pour la deuxième phase du plan Juncker.
  2. Obtenir plus de flexibilité dans les dépenses et investissements publics, par le biais d'une réforme ciblée du Pacte de stabilité et de croissance, en vertu de la position de la CES[2].
  3. Instaurer une trésorerie de l’UE/UEM, en vertu de la position de la CES[3].
  4. La lutte contre l’évasion fiscale, en vertu de la position de la CES[4].
  5. Recourir à l’Assiette Commune Consolidée pour l'Impôt des Sociétés afin d’éviter l’arbitrage fiscal à des fins d’impôt et le dumping fiscal, en vertu de la position de la CES[5].
  6. L’Union des marchés des capitaux, la lutte pour de meilleures réglementations et contre la technique de titrisation, en vertu de la position de la CES[6].
  7. Une implication efficace des partenaires sociaux dans la gouvernance économique de l’UE et dans le semestre européen grâce à l’application des meilleures pratiques présentées dans la boîte à outils de la CES[7], afin d’aller vers un semestre plus respectueux de la société et focalisé sur le respect des droits sociaux et des travailleurs.

 

Des hausses de salaires et la convergence des salaires vers le haut, grâce à une négociation collective plus poussée, au dialogue social et à la participation des travailleurs.

 

  1. Mettre en œuvre la campagne de la CES en faveur d’une hausse des salaires[8], à travers :
  1. Des cycles de négociation collective généralisés et coordonnés pour une hausse des salaires à tous les niveaux, avec un salaire en phase avec l’inflation et l'évolution de la productivité.
  2. Une action visant l’augmentation du salaire minimum et le renforcement des systèmes de salaire minimum lorsque de tels systèmes existent déjà.
  3. Une action visant la défense/le renforcement/la création de systèmes de négociation collective, en particulier au niveau national/sectoriel.
  4. Le développement de la couverture de la négociation collective à tous les niveaux, y compris pour les formes atypiques d’emploi.
  5. La cessation des interventions indésirables de la part des institutions dans les systèmes de négociation collective et de salaire minimum.
  6. L’établissement d’un cadre légal et d’outils de renforcement des capacités afin de mettre en place une négociation collective solide ainsi que des systèmes de salaire minimum lorsqu’il y a lieu.
  7. Une action visant une convergence des salaires à la hausse à travers les pays et les secteurs, mais également au sein des entreprises multinationales et des chaînes d’approvisionnement.
  8. L’élimination de l’écart salarial entre sexes ainsi que la lutte contre le salaire minimum injustifié et discriminatoire envers les jeunes travailleurs et contre toute autre forme de discrimination salariale.
  9. La relance et le renforcement de la coopération et coordination de la CES par rapport à la négociation collective entre les pays, afin d’atteindre les objectifs précités.
  1. Relancer le dialogue social aux niveaux européen et national, à travers :
  1. Un programme de travail solide basé sur les résultats concrets à livrer.
  2. Des négociations des partenaires sociaux réalistes et efficaces.
  3. L’exécution et la mise en œuvre des accords existant entre les partenaires sociaux et de la législation relative.
  4. Le renforcement des capacités pour améliorer le dialogue social, en particulier au niveau national.
  1. Renforcer la participation des travailleurs à tous les niveaux, à travers :
  1. L’amélioration de la directive sur le comité d’entreprise européen, en avançant les dix revendications de la CES, en vertu de la position de la CES[9].
  2. Un nouveau cadre européen relatif aux droits à l’information, la consultation et la représentation au sein des conseils d'administration et de supervision, qui constituerait une architecture nouvelle et intégrée pour l’implication des travailleurs dans les entreprises européennes[10].

 

Une transition juste vers une économie à faibles émissions de carbone, une numérisation et une automatisation durables, une mondialisation équitable, un agenda commercial progressiste et l'avenir du travail.

 

  1. Mettre en œuvre une transition juste vers une économie à faibles émissions de carbone, à travers :
  1. Le soutien de l’accord de Paris (en coopération avec la CSI) grâce au respect des engagements pris en appliquant l’ambitieux cadre de l’UE pour le climat et l'énergie à l'horizon 2030.
  2. Un fonds pour une Transition juste afin de gérer les changements climatiques et d’avancer sur la voie d’une économie verte à faibles émissions de carbone.
  3. Une coopération avec la CSI sur les stratégies globales pour une transition juste.
  1. Gérer la numérisation et l’automatisation de manière durable, en reposant sur la création d’emplois, la protection des droits des travailleurs, la mise à niveau des compétences et la protection sociale, le tout soutenu par le financement public et l’imposition.
  2. Mettre en œuvre l’initiative de la CES pour un agenda commercial progressiste et équitable, à négocier avec la Commission européenne ainsi que tous les autres partenaires syndicaux et interlocuteurs institutionnels à travers le monde.
  3. Participer au processus pour mettre en œuvre l’initiative de l’OIT sur l’avenir du travail, par le biais d’initiatives au niveau européen, notamment par un pilier européen des droits sociaux solide et concret, et d’organisations syndicales, en particulier visant le travail atypique.
  4. Veiller à la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 des Nations unies en appliquant pleinement les objectifs de développement durable au sein de l’UE.

 

Une Europe plus sociale et davantage de droits sociaux, grâce à un pilier européen des droits sociaux fort qui améliore la vie des travailleurs et à un protocole de progrès social.

 

  1. Appuyer un solide pilier européen des droits sociaux (ESPR) qui améliore la vie des travailleurs, à travers :
  1. Une pression exercée sur les États membres afin qu’ils proclament sans tarder l’ESPR, en réclamant aux gouvernements sa mise en pratique et une forte implication des partenaires sociaux à tous les niveaux.
  2. L’intégration de l’EPSR dans le Semestre européen, en le transformant en Semestre économique et social par l’introduction de recommandations sociales positives et efficaces, la fixation de normes et d’objectifs pour la convergence à la hausse et la mise en œuvre des droits sociaux.
  3. La pleine application de l’ensemble des initiatives législatives et non législatives afin de promouvoir un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie privée et favoriser l’égalité des sexes.
  4. L’amélioration du socle de droits pour toutes les catégories de travailleurs, en garantissant la non-régression, en réduisant la précarité au travail et en stimulant la création d’emplois de qualité, en garantissant l’accès universel aux systèmes de protection sociale et l’efficacité de ces systèmes, en appliquant les initiatives législatives sur la déclaration écrite et la protection sociale ainsi qu’en promouvant toute nouvelle initiative qui pourrait servir à cette fin.
  5. L’application des droits et instruments juridiques existants dans le cadre des « acquis sociaux » européens au moyen de tous les outils législatifs et non législatifs disponibles.
  1. Relancer l’initiative de la CES pour le Protocole de progrès social[11] comme partie intégrante et condition essentielle à toute modification possible du traité. Si aucune modification n’est apportée au traité, explorer d’autres éventuelles initiatives législatives pour veiller à ce que les droits sociaux et les libertés économiques aient le même degré d'importance dans les règles et pratiques de l’UE.

 

Une action visant à lutter contre le dumping social et salarial et à parvenir à un traitement et une intégration équitables, par le biais d'une mobilité et d'une migration équitables au sein d’un marché intérieur juste.

 

  1. Lutter contre le dumping social, salarial et fiscal ainsi que pour une mobilité choisie et équitable au sein d'un marché intérieur juste, à travers :
  1. La garantie d’un traitement tout à fait équitable, c’est-à-dire « le même salaire pour le même travail au même endroit », ainsi que d’une convergence des salaires à la hausse en Europe, à travers les pays et les secteurs, au moyen d’initiatives et de mesures législatives et non législatives.
  2. La négociation d’une révision juste et satisfaisante de la directive européenne relative au détachement des travailleurs ainsi que du règlement 883/2004 sur la coordination des systèmes de sécurité sociale, et une pression exercée sur les États membres dans cette optique, y compris auprès des pays les plus réticents.
  3. Le frein aux activités des sociétés boîte aux lettres, en appuyant l’approche du « siège réel » et l’évaluation des activités économiques effectives des entreprises, facilitant un échange d'informations et une coopération efficaces entre les autorités des États membres.
  4. Le renforcement des capacités des autorités de contrôle et d’application des États membres.
  1. Défendre une politique européenne de migration et d’asile juste et équitable, à travers :
    1. L'obtention d'une politique d’asile avisée conforme aux lois et obligations internationales fondée sur l’accueil, la solidarité, la responsabilité et la redistribution, en employant tous les outils législatifs et non législatifs disponibles ainsi qu’en révisant le règlement de Dublin.
    2. Le développement d’une politique efficace de coopération internationale avec les pays d'origine, soutenu par le financement approprié.
    3. La mise en place d’une politique d'intégration efficace fondée sur l’égalité complète de traitement, la non-discrimination et le respect des droits, en maintenant un équilibre dans les opportunités d’emplois et les prestations de protection sociale offertes aux travailleurs natifs du pays concerné et aux migrants.
    4. Une révision coordonnée du cadre légal européen relatif aux migrations sur la base de ces principes.
    5. Le renforcement de l’action des partenaires sociaux, des capacités et des réseaux pour l’intégration.

 

 


[1] https://www.etuc.org/IMG/pdf/FR-A-new-path-for-europe.pdf

 

[2] https://www.etuc.org/sites/www.etuc.org/files/document/files/fr-position-flexibilities-stability-growth-pact.pdf

 

[3] https://www.etuc.org/fr/documents/un-tr%C3%A9sor-europ%C3%A9en-pour-les-investissements-publics-position-de-la-ces#.WZ6h2bpuKUk

 

[4] https://www.etuc.org/fr/documents/position-de-la-ces-sur-le-paquet-de-mesures-de-la-commission-europ%C3%A9enne-contre-l%C3%A9vasion#.WZ6ixLpuKUk

 

[5] https://www.etuc.org/fr/documents/position-de-la-ces-sur-lassiette-commune-consolid%C3%A9e-pour-limp%C3%B4t-des-soci%C3%A9t%C3%A9s-accis#.WZ6i6LpuKUk

 

[6] https://www.etuc.org/sites/www.etuc.org/files/document/files/adopted_13-fr-etuc_position_on_the_capital_markets_union.pdf

 

[7] https://www.etuc.org/fr/documents/r%C3%A9solution-de-la-ces-sur-limplication-syndicale-dans-le-semestre-europ%C3%A9en#.WZ6lHSgjGUk

 

[8] https://www.etuc.org/fr/documents/resolution-etuc-pay-rise-campaign#.WZ6lVLpuKUk

[9] https://www.etuc.org/fr/documents/position-de-la-cespour-une-directive-moderne-sur-le-comit%C3%A9-dentreprise-europ%C3%A9en-cee-%C3%A0-l%C3%A8re#.WZ6lyrpuKUk

[10] https://www.etuc.org/fr/documents/position-de-la-ces-orientation-pr-nouveau-cadre-europ-sur-droits-%C3%A0-linfo-la-consultation#.WZ6mILpuKUk

 

[11] https://www.etuc.org/fr/proposition-de-la-ces-pour-un-protocole-de-%C2%AB-progr%C3%A8s-social-%C2%BB