Position de la CES sur le renforcement de la validation de l’apprentissage non formel et informel
Adoptée lors du Comité Exécutif virtuel du 22-23 mars 2021
Contexte Le 1er juillet 2020, la Commission européenne a publié un nouveau paquet d’initiatives politiques, la « stratégie actualisée en matière de compétences[1] », accompagné d’un document de travail des services de la Commission : Évaluation de la recommandation du Conseil de 2012 sur la validation de l’apprentissage non formel et informel (2020). Ce dernier évalue la mise en œuvre de la recommandation du Conseil du 20 décembre 2012 relative à la validation de l’apprentissage non formel et informel (ANFI). La recommandation du Conseil susmentionnée exige des États membres qu’ils soutiennent les individus lors de la validation de leurs compétences en vue d’une formation continue et d’un développement de carrière. La Commission européenne établit une distinction entre l’apprentissage formel (par exemple, les programmes d’éducation et de formation dans des établissements), non formel (par exemple, la formation en entreprise) et informel (par exemple, l’expérience professionnelle et de vie), dans une perspective d’apprentissage tout au long de la vie. Selon la recommandation du Conseil, « (i) la validation signifie un processus de confirmation par un organisme habilité, qu’une personne a acquis des résultats d’apprentissage correspondant à une norme donnée et elle consiste en quatre étapes distinctes mentionnées ci-après : 1. Identification par un dialogue des expériences spécifiques de l’intéressé ; 2. Les documents visant à rendre ces expériences visibles ; 3. L’évaluation formelle de ces expériences ; et 4. La certification des résultats de l’évaluation qui peut conduire à une qualification partielle ou complète ; et j) la reconnaissance des apprentissages antérieurs, c’est-à-dire la validation des résultats de l’apprentissage, qu’il soit formel, non formel ou informel, obtenus avant la demande de validation. » [2] Le groupe consultatif de la Commission européenne sur le cadre européen des certifications (CEC) a assuré le suivi de la mise en œuvre de la recommandation du Conseil sur l’ANFI. Il a été demandé aux pays de lier les qualifications/certificats validés par l’ANFI aux qualifications formelles de l’éducation et de la formation dans leurs cadres nationaux de qualifications (CNQ). Le groupe consultatif du CEC examine actuellement le document de travail des services de la Commission sur l’évaluation de la recommandation du Conseil de 2012. Ce document de position est la contribution de la CES au débat politique au niveau de l’UE sur le renforcement des politiques et des mesures visant à soutenir les individus dans la validation de l’apprentissage non formel et informel. Son objectif est de :
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La numérisation et la décarbonisation ont un impact énorme sur la main-d’œuvre européenne. C’est pourquoi la CES a demandé des stratégies efficaces d’amélioration et de reconversion des compétences qui soutiennent les travailleurs dans cette transition. Selon le dernier rapport[3] du Cedefop, 46,1 % de la population adulte, soit environ 128 millions d’adultes dans les États membres de l’UE-27, au Royaume-Uni, en Islande et en Norvège, ont besoin d’une formation complémentaire et d’une requalification. « Ces adultes peuvent présenter un faible niveau d’éducation, de faibles compétences numériques, de faibles compétences cognitives ou avoir un niveau d’éducation moyen à élevé et courir le risque de perdre leurs compétences et de devenir obsolètes. Les estimations brossent un tableau alarmant et laissent entrevoir un réservoir de talents et un potentiel inexploité bien plus important que les 60 millions d’adultes peu instruits que l’on qualifie généralement de peu qualifiés », indique le rapport. La CES est profondément préoccupée par le fait que la crise du COVID-19 et ses conséquences économiques contribueront au chômage de longue durée de nombreuses personnes dont les compétences deviendront obsolètes au cours de leur recherche d’emploi. Par conséquent, les travailleurs et les chômeurs ont besoin d’urgence d’un soutien non seulement pour accéder à des formations de perfectionnement et de requalification, mais aussi pour valider leurs aptitudes et leurs compétences. Comme le souligne la recommandation du Conseil de 2012 sur l’ANFI, « La validation des résultats d’apprentissage, c’est-à-dire savoirs, aptitudes et compétences, acquis par un apprentissage non formel ou informel peut contribuer de façon importante à renforcer l’employabilité et la mobilité et à accroître la motivation en faveur de l’apprentissage tout au long de la vie, notamment chez les personnes défavorisées sur le plan socio-économique ou les personnes peu qualifiées. »
Nous reconnaissons que les États membres de l’UE ont pris des mesures importantes pour améliorer leurs systèmes de validation depuis l’adoption de la recommandation du Conseil de 2012. 14 pays ont amélioré leurs systèmes de validation, dans 22 pays la validation est devenue plus accessible, et l’acquisition de qualifications par la validation est maintenant possible dans 18 pays (contre 12 pays en 2012)[4]. Ces chiffres sont encourageants, mais ils montrent également que la recommandation du Conseil n’a pas encore été pleinement mise en œuvre dans de nombreux pays. Les gouvernements doivent faire un effort plus important pour accélérer le processus. La CES est également préoccupée par le fait que seuls 7 pays de l’UE[5] disposent d’une ligne budgétaire nationale spécifique pour la validation, les autres utilisant une approche décentralisée et des projets à court terme pour soutenir la validation. Afin de rendre les processus de validation disponibles pour tous et entièrement inclusifs, ils doivent être gratuits et avoir lieu dans des institutions publiques.
Nous regrettons également que le soutien apporté aux personnes intéressées ne soit pas suffisant pour valider leurs aptitudes et leurs compétences.[6] Le rapport d’évaluation souligne que de nombreuses personnes commencent le processus de validation sans le finaliser, principalement parce que le processus de validation peut être long et énergivore. En outre, dans de nombreux cas, le congé-éducation payé et/ou une aide financière ne sont pas fournis aux fins de la validation. La CES a plaidé pour que les pays appliquent pleinement la convention (n° 140) de l’OIT sur le congé-éducation payé, 1974, afin de garantir le droit à un congé payé pour poursuivre des études professionnelles, pour soutenir le développement de la carrière et pour la validation des qualifications et des compétences.
Les employeurs doivent donner leur juste part en offrant à leurs travailleurs des formations de qualité et inclusives, en les aidant à valider leurs aptitudes et leurs compétences et en reconnaissant les formations de leurs travailleurs. Ils doivent également les soutenir en leur accordant des congés payés pour valider leurs aptitudes et compétences. La CES se félicite que le nombre de pays où la validation est possible via les acteurs du marché du travail (entreprises, organisations patronales, etc.) ait augmenté au cours des 9 dernières années, mais regrette que cela ne soit possible que dans 17 pays[7] et non dans l’ensemble de l’UE. Dans le même temps, il est important d’éviter que les employeurs n’abusent des processus de validation comme méthode rapide et peu coûteuse de qualification de leurs travailleurs. La validation ne doit pas être utilisée pour maintenir les travailleurs peu qualifiés au même niveau de qualification. Au contraire, la validation doit devenir le point de départ de la formation continue des travailleurs.
Il est également important d’améliorer l’orientation et les conseils fournis aux travailleurs et aux chômeurs pour les informer sur les processus de validation. Le système des représentants de formation étant un instrument important, les syndicats qui fournissent des informations aux travailleurs dans les entreprises sur les possibilités de formation ont besoin d’une aide financière pour étendre leur soutien. Cette aide est essentielle, notamment dans le cas du soutien aux travailleurs « peu qualifiés » qui peuvent manquer de motivation pour participer à des formations mais qui ont acquis des qualifications et des compétences importantes grâce à une longue expérience professionnelle. Savoir à l’avance qu’il existe la possibilité et l’opportunité de recevoir un soutien efficace pour valider les aptitudes et les compétences peut représenter pour ces travailleurs une motivation importante de suivre une formation complémentaire.
Selon le rapport d’évaluation, il est regrettable que le soutien ciblé à la validation pour les migrants et les réfugiés soit principalement disponible par le biais de projets financés et non dans le cadre des canaux habituels. C’est pourquoi il est important d’apporter un soutien supplémentaire aux syndicats. Ces syndicats, qui sont membres de l’UnionMigrantNet, fournissent déjà un soutien aux migrants et aux réfugiés en matière de validation des qualifications et des compétences. La CES et les partenaires économiques et sociaux européens ont travaillé sur le projet LABOUR-INT[8] afin de renforcer les efforts des partenaires sociaux et des autres parties prenantes pour soutenir la reconnaissance et la validation des aptitudes et des compétences des migrants, des demandeurs d’asile et des réfugiés. Toutefois, la mise en place de systèmes systématiques et durables soutenus par les gouvernements devrait être l’objectif ultime.
La CES se réjouit que le groupe consultatif du CEC ait commencé à discuter de la manière d’améliorer les stratégies de validation afin de mieux soutenir les individus grâce aux approches suivantes : 1. Sensibilisation ; 2. Établissement de la confiance ; 3. Partage d’informations ; 4. Offre d’orientation et de conseil ; 5. Un accès facilité ; 6. Financement de la validation ; 7. Adaptation aux besoins et objectifs individuels ; 8. Protection des droits individuels ; 9. Visibilité des normes ; et 10. Garantir la portabilité et la transférabilité. La CES a consulté ses organisations[9] membres sur la manière dont ces approches peuvent faire de la validation une réalité pour les individus.
En conclusion, la CES demande à la Commission européenne de faire appliquer la recommandation du Conseil du 20 décembre 2012 sur la validation de l’apprentissage non formel et informel (ANFI), avec une conclusion du Conseil, en respectant les compétences nationales en matière d’éducation et de formation et les processus de validation.
- Sensibilisation
Les syndicats sont bien informés de l’intérêt de la validation des formations. Malheureusement, de nombreux systèmes n’offrent toujours pas une compréhension claire du fonctionnement du processus de validation. Ces systèmes ne permettent pas non plus de s’assurer que les employeurs soutiennent la validation et la reconnaissance des formations qui conduiraient à des qualifications complètes. Le renforcement du dialogue social national sur les procédures de validation et de reconnaissance est un outil important pour sensibiliser aux faiblesses de certains systèmes nationaux sur ces procédures.
Les partenaires sociaux européens (CES, BusinessEurope, SMEUnited et CEEP/SGI Europe) ont mené des recherches sur la formation des travailleurs au cours d’un projet de deux ans (2016-18) sur la promotion du partenariat social dans la formation des travailleurs. Il est apparu que le manque de validation et de reconnaissance de la formation des travailleurs, de l’apprentissage des adultes et de l’expérience professionnelle sont des obstacles à la motivation des adultes et des travailleurs à suivre des formations. Les syndicats ont souligné que les politiques nationales de validation et la mise en œuvre de la recommandation du Conseil de 2012 sur l’ANFI ne peuvent être efficaces que si elles sont décidées dans le cadre d’un dialogue social approprié avec les partenaires sociaux. Le problème est cependant que le dialogue social sur les politiques de validation est encore faible ou inexistant dans plusieurs pays européens ; même si la recommandation du Conseil de 2012 sur l’ANFI indique clairement que les syndicats devraient être impliqués dans le développement et la mise en œuvre de la politique au niveau national.
La recommandation conjointe des partenaires sociaux européens, qui est le résultat final du projet des partenaires sociaux, souligne que « la formation des travailleurs peut contribuer à créer un bon environnement de travail, qui assure leur bien-être au travail, les motive et leur permet de progresser dans leur carrière et leurs revenus ». Cependant, la progression de la carrière et du salaire se fait lorsqu’il y a validation et reconnaissance de la formation et qu’elle est généralement définie dans le cadre d’une convention collective. En outre, la recommandation conjointe stipule que « (12) les représentants syndicaux peuvent jouer un rôle actif en encourageant les travailleurs à suivre une formation et/ou à bénéficier de services d’orientation professionnelle, et fournir des services de soutien aux travailleurs pour l’utilisation du potentiel de validation de l’apprentissage non formel et informel. Les syndicats devraient fournir à leurs représentants les ressources et la formation appropriées pour ce faire. Les employeurs devraient veiller à ce que leurs services d’orientation professionnelle et de soutien en ressources humaines soient accessibles à tous les travailleurs et à ce qu’ils tiennent ces derniers informés des possibilités de formation. (13) Les États membres, les partenaires sociaux et les prestataires d’éducation et de formation devraient concevoir la formation des travailleurs d’une manière qui soit fondée sur l’approche fondée sur les acquis de l’apprentissage et qui soit compatible avec la validation et la certification des compétences, telles que définies dans les pratiques nationales, et qui donne accès et aide à acquérir des qualifications supplémentaires et supérieures. En outre, l’apprentissage non formel et informel devrait être mieux reconnu comme faisant partie de la progression de carrière et être validé comme faisant partie de la formation des travailleurs ».
- Établir la confiance dans la validation
De même que l’éducation de qualité et l’éducation inclusive, la formation et l’apprentissage tout au long de la vie sont des droits relevant du socle européen des droits sociaux, le droit d’accéder à des processus de validation et de reconnaissance de qualité et inclusifs devrait également être garanti à tous les adultes, chômeurs et travailleurs. Les individus seront plus enclins à faire confiance aux procédures de validation s’ils savent que les syndicats de travailleurs ont été impliqués dans les décisions relatives aux processus de validation ; si le processus est basé sur des normes convenues et sur l’assurance qualité ; s’il y a transparence des systèmes ; et si la transférabilité des certificats est assurée. La meilleure façon de convenir d’une politique de compétence et d’avoir confiance dans le résultat est d’instaurer un dialogue social efficace entre le gouvernement et les partenaires sociaux, ainsi qu’une large coopération avec les établissements de formation.
L’évaluation et l’accréditation des compétences professionnelles acquises par l’expérience professionnelle et par la formation non formelle sont des actions fondamentales pour la justice sociale, et un pilier important de l’apprentissage tout au long de la vie. La reconnaissance formelle de la qualification des travailleurs, obtenue par la validation par l’entreprise, tant dans les contrats de travail que dans les négociations collectives, contribuera à instaurer la confiance dans le processus.
Les travailleurs et les chômeurs feront davantage confiance aux procédures de validation si celles-ci aboutissent à une certification par des institutions publiques ou par des institutions accréditées, et lorsque les partenaires sociaux sont impliqués dans les procédures de validation et les évaluations. Les procédures d’évaluation dans le cadre du processus de validation doivent faire l’objet d’une assurance qualité pour être légales, fiables et objectives.
Les procédures de validation devraient s’inscrire dans le cadre du système national d’éducation et de qualification. Les systèmes de validation et de reconnaissance doivent être complémentaires du système de qualification existant, et les certificats et qualifications délivrés dans le cadre des procédures de validation doivent être liés au cadre national de qualification. Ceci est important car les qualifications formelles sont le point de référence qui permet aux travailleurs d’être assurés qu’ils peuvent utiliser les résultats de la validation. Lorsque les procédures de validation ne conduisent pas à une qualification complète, le travailleur doit être informé de l’offre de formation disponible et de la manière de la réaliser afin d’obtenir une qualification complète.
L’orientation professionnelle et le conseil, l’orientation de la formation et le tutorat en entreprise (par exemple les programmes Unionlearn), sont des conditions préalables fondamentales pour sensibiliser et faire connaître les possibilités offertes dans le cadre d’une procédure de validation. À cette fin, non seulement les services d’orientation doivent être développés et normalisés, mais il est également nécessaire de sensibiliser massivement les employeurs, les travailleurs, les services de l’emploi et les écoles à la validation.
- Diffusion d’informations sur la validation
Les travailleurs et les employeurs connaissent encore peu les possibilités qu’offre la validation. Plusieurs organisations membres de la CES ont signalé que la disponibilité des informations sur les processus de validation est souvent fragmentée en raison du grand nombre d’acteurs qui s’occupent de la validation (par exemple, les institutions d’EFP, les universités, les chambres, etc.)). Une telle approche décentralisée n’est pas utile pour les individus, en particulier pour les travailleurs, et les démotive à entamer des procédures de validation. Ce problème pourrait être surmonté si les services publics de l’emploi fournissaient non seulement des conseils et des orientations aux individus sur l’EFP continue, mais aussi sur les procédures de validation.
Les syndicats aux niveaux européen, national et local peuvent jouer un rôle important en fournissant des informations sur les avantages de la validation et en apportant leur soutien aux travailleurs dans le processus. Ce rôle doit être reconnu et facilité par les gouvernements.
- Orientation et conseils avant, pendant et après la validation
Des orientations et des conseils doivent être fournis à chacune des quatre étapes du processus de validation décrit dans la recommandation du Conseil de 2012. Un soutien aux personnes avant, pendant et après le processus d’évaluation et de certification est nécessaire pour répondre à leurs attentes, augmenter leurs chances de réussite et réduire les abandons au cours du processus de validation. Il est de la plus haute importance de s’assurer que les spécialistes en orientation disposent d’une compréhension générale des procédures de validation et d’informations actualisées. Des professionnels spécialisés et qualifiés sont nécessaires pour soutenir les individus tout au long du processus de validation.
Les expériences des syndicats indiquent que les structures d’orientation sont fragmentées, les services de l’emploi ont tendance à être plus axés sur le placement et moins sur la qualification. L’orientation pendant la validation dépend de la politique de l’entreprise et de l’implication des syndicats et des partenaires sociaux dans les systèmes de validation. Certains employeurs et partenaires sociaux sectoriels sont soutenus par des fonds de formation, ce qui signifie qu’ils peuvent très bien organiser ce processus. Cependant, l’orientation doit être garantie comme un droit pour tous les travailleurs et sa qualité et son caractère inclusif doivent être améliorés. Une bonne information et une bonne orientation sont des conditions préalables importantes pour rendre la validation pleinement inclusive, et les gouvernements devraient soutenir cette démarche par une politique et un budget efficaces.
Malheureusement, de nombreux travailleurs sont encore travailleurs dans des secteurs où le dialogue social est faible, voire inexistant, ce qui constitue un obstacle à la garantie d’une orientation et de conseils de qualité sur le lieu de travail. Il est essentiel que les employeurs soient encouragés à investir dans leurs travailleurs et que les gouvernements garantissent le droit national, et le budget national ou régional, à l’orientation et au conseil, pour tous les travailleurs, à toutes les étapes du processus de validation. La CES demande qu’une politique européenne soutienne cette démarche par une recommandation du Conseil sur l’orientation et le conseil.
Les syndicats peuvent jouer un rôle important dans le processus d’orientation, car ils ont la confiance des travailleurs et ils savent comment ces derniers doivent développer leurs compétences. Plusieurs syndicats sont soutenus, soit par les gouvernements, soit par les entreprises, pour fournir des conseils et des orientations sur les formations disponibles pour les travailleurs dans les entreprises, sur la validation de ces formations et sur la manière de motiver les travailleurs à assister à ces sessions. Néanmoins, les syndicats aux niveaux européen, national et local ont besoin de plus de soutien pour s’assurer que des informations actualisées sur les procédures de validation parviennent aux travailleurs, et pour mettre en place un système d’orientation syndicale (représentants de formation) dans d’autres pays.
Le soutien des syndicats par les différentes administrations nationales ou régionales des États membres de l’UE par le biais du développement de projets d’information et d’orientation ou d’accords de collaboration publique pour les travailleurs avec un soutien financier, provenant également des fonds européens, devrait être une mesure à envisager.
- Faciliter l’accès des personnes
La CES estime que les procédures de validation et l’apprentissage tout au long de la vie doivent faire partie d’une stratégie structurée du marché du travail et que les gouvernements doivent veiller à ce que ces deux politiques soient liées et que les actions ne soient pas isolées. Des politiques efficaces au niveau national et au niveau des entreprises, ainsi que des actions qui facilitent une meilleure connexion entre la validation et l’orientation professionnelle sont nécessaires. Cela permettrait d’exploiter pleinement les possibilités de validation et de soutenir l’individu tout au long du parcours de validation.
La validation doit s’inscrire, et être pensée, dans le cadre des aspirations professionnelles générales de l’individu. La validation de certaines qualifications professionnelles est soumise à des restrictions, mais les possibilités devraient être larges pour que chacun puisse avoir accès à la validation, ce qui conduirait à la certification et aux qualifications de toutes les professions et de tous les métiers. Certaines procédures de validation sont trop compliquées et moins accessibles aux travailleurs peu qualifiés. Les procédures de validation ne devraient pas être consommatrices de temps et d’énergie et elles devraient être adaptées aux besoins de chacun. La validation est également utile pour permettre l’accès à un examen de formation professionnelle.
- Soutien financier à la validation
Les coûts du processus de validation sont souvent réglementés par une convention collective ou payés par un fonds de formation sectoriel. Lorsque ce n’est pas le cas, les personnes doivent payer elles-mêmes la procédure (formations complémentaires, matériel d’apprentissage, examens, accès à une formation complémentaire, certificat, etc.). Seuls quelques pays disposent d’un budget national pour soutenir les processus de validation, selon le rapport d’évaluation. Ceci est inacceptable. Cela démotive également, en particulier les travailleurs peu qualifiés et les chômeurs. C’est pourquoi les syndicats demandent un budget public durable pour couvrir le coût de la procédure de validation et de la formation, et un investissement efficace des employeurs dans la formation de leurs travailleurs et la validation de leurs qualifications et compétences.
Les comptes individuels d’apprentissage/chèques-formation devraient pouvoir être utilisés pour soutenir l’accès aux procédures de validation. Dans certains fonds de formation ou conventions collectives, la validation est liée à des parcours individuels d’apprentissage. Cette pratique devrait être étendue à tous les pays européens, car elle constitue une approche efficace et utile pour les salariés afin de renforcer leur position sur le marché du travail.
- Adapter le processus aux besoins et objectifs individuels
Les politiques nationales doivent stimuler et faciliter les procédures de validation qui sont flexibles et adaptables aux besoins spécifiques des individus. Les procédures de validation doivent garantir que les individus puissent obtenir des informations sur le processus de validation et s’engager dans un processus adapté à leurs besoins. Les formations doivent être accessibles géographiquement. Elles devraient assurer un équilibre entre vie professionnelle et vie privée. Il serait essentiel de prolonger la durée et l’offre des processus de validation.
Les employeurs (RH) et les représentants syndicaux doivent veiller à ce que les travailleurs soient bien informés sur les lieux de travail. De nombreux travailleurs ne connaissent pas les possibilités de validation de leur expérience professionnelle avant qu’il ne soit déjà trop tard, par exemple lorsqu’ils risquent de devenir chômeurs ou qu’ils sont sur le point de changer de secteur. À ce stade, cependant, il est trop difficile d’organiser le processus de validation.
La validation est plus efficace lorsque la demande de validation de l’expérience professionnelle vient du travailleur lui-même, plutôt que d’être « imposée » par le haut. Les travailleurs doivent se voir offrir la possibilité de demander une procédure de validation et être informés de l’ensemble du processus et des résultats de la procédure de validation.
Il est important de communiquer clairement sur la valeur de la certification. Les gouvernements devraient assurer et organiser des campagnes de communication pour sensibiliser les travailleurs, les secteurs et les employeurs à la valeur de la validation, ainsi qu’à l’impact de la validation sur la carrière et les emplois des travailleurs. Il est également important que les gouvernements offrent des conseils et un soutien gratuits et indépendants aux travailleurs.
- Protection des droits individuels lors de la validation
Tout adulte devrait avoir le droit d’accéder à des processus de validation de qualité et inclusifs et devrait être traité de manière juste et équitable pendant le processus. Le caractère volontaire du processus exige la garantie de simplicité, d’accessibilité, de transparence, d’objectivité, de traçabilité, de confidentialité, de correction méthodologique, d’exhaustivité et d’équité des procédures de validation. Un processus de validation équitable, de haute qualité et inclusif devrait garantir que les individus obtiennent les mêmes résultats dans les mêmes conditions. Cela doit être réalisé par les agences de qualification dans le cadre de la coordination interinstitutionnelle et en dialogue avec les partenaires économiques et sociaux à tous les niveaux.
Les membres de la CES signalent que la validation est parfois utilisée dans le processus de licenciement d’un travailleur. Par conséquent, il est essentiel de réglementer le processus de validation pour garantir qu’il est indépendant, que le travailleur est propriétaire des résultats de la validation et qu’il ne devrait pas être obligé de partager les résultats de la validation avec son employeur. La CES estime que les systèmes de validation devraient être améliorés afin de fournir un soutien ciblé aux travailleurs et aux chômeurs qui sont défavorisés sur le plan socio-économique, ainsi qu’aux migrants et aux réfugiés qui peuvent avoir besoin d’une aide supplémentaire (par exemple, des traducteurs) pour soutenir les processus de validation.
L’égalité des sexes devrait être assurée en soutenant les travailleuses et les chômeuses dans le cadre des procédures de validation, en tenant compte également des responsabilités familiales.
- Rendre les normes visibles pour les individus
Les gouvernements doivent garantir que les processus de validation délivrent des certificats fiables. Des lignes directrices nationales, convenues avec les partenaires sociaux, doivent indiquer, en détail, les normes minimales des procédures de validation. De nombreuses normes sont sectorielles, les normes de validation doivent être conçues pour fonctionner au-delà des frontières sectorielles et entre les établissements de formation et le marché du travail. Cependant, peu de normes sont reconnues au-delà des secteurs, il serait donc important de renforcer la coopération intersectorielle par une politique efficace.
Il serait essentiel d’assurer une meilleure compréhension et une meilleure coopération entre le système éducatif et le marché du travail sur les procédures de validation, avec le soutien de la recherche. Un cadre juridique devrait garantir la participation des partenaires sociaux. Il devrait être transparent et contrôler les normes de qualité des procédures et des prestataires de formation (établissements ou entreprises d’EFP), dont beaucoup délivrent des certificats sans disposer d’une accréditation ou en respectant le contrôle de qualité. C’est le problème que pose le fait que de nombreuses organisations délivrent des micro-certificats, comme le souligne la CES dans sa position.[10]
- Garantir la portabilité et la transférabilité
Afin de soutenir une transition juste des travailleurs sur le marché du travail et la liberté de mobilité en Europe, la transférabilité des certificats doit être garantie. Cela n’est possible que si les procédures de validation garantissent que les certificats ou les qualifications délivrés à la fin du processus sont liés à des qualifications ou des professions formelles. Très souvent, les résultats de la validation conduisent à une qualification partielle nécessitant une formation complémentaire. Garantir que les travailleurs puissent accéder à cette formation complémentaire est particulièrement nécessaire pour qu’ils obtiennent leur qualification complète.
Les gouvernements devraient garantir l’assurance qualité des procédures de validation et le contrôle adéquat des prestataires, afin d’accroître la confiance dans les certificats et de les rendre transférables. Malheureusement, les certificats sont encore limités dans leur transférabilité entre les secteurs et entre l’EFP et les établissements d’enseignement supérieur. De nombreux travailleurs ne savent pas comment utiliser leurs certificats et ne connaissent pas les possibilités, même au niveau national. Afin de relever ce défi, les gouvernements, les partenaires sociaux et les parties prenantes concernées (par exemple les établissements d’enseignement) devraient élaborer un format commun de résultats d’apprentissage et convenir de la reconnaissance des certificats et des diplômes au niveau national, ainsi qu’entre les établissements et les secteurs.
[1] Communication sur un « programme européen en matière de compétences pour une compétitivité durable, l’équité sociale et la résilience", 2020
[2] Recommandation du Conseil du 20 décembre 2012 relative à la validation de l'apprentissage non formel et informel
[3] CEDEFOP: Empowering adults through upskilling and reskilling pathways. Volume 1: adult population with potential for upskilling and reskilling,, 02/2020
[4] Document de travail des services de la Commission : Évaluation de la recommandation du Conseil de 2012 sur la validation de l'apprentissage non formel et informel (2020)
[5] BE, ES, FR, IT, LU, NL, RO
[6] Document de travail des services de la Commission : Évaluation de la recommandation du Conseil de 2012 sur la validation de l'apprentissage non formel et informel s (2020)
[7] Document de travail des services de la Commission : Évaluation de la recommandation du Conseil de 2012 sur la validation de l'apprentissage non formel et informel s (2020)
[8] http://www.labour-int.eu/skillsmigration/
[9] Les membres du Comité permanent éducation et formation de la CES ont été invités à exprimer leur avis sur ces sujets entre le 24 novembre et le 4 décembre 2020. Des réponses ont été reçues de la DGB (Allemagne), de la GSEE (Grèce), de la CGIL, de la CISL et de l'UIL (Italie), de la FNV (Pays-Bas), de l'UNIO (Norvège), de l'UGT-E (Espagne), de Saco, de LO et de TCO (Suède).
[10] Position commune de la CES et du CSEE sur les microcertificats dans l'EFP et l'enseignement supérieur, 2020