Résolution de la CES« Mieux légiférer » pour tous dans l’UE
Résolution de la CES adoptée par le comité exécutif à la réunion du 28-29 octobre 2020
Messages clés de la CES
Le programme pour une meilleure réglementation doit profiter à tous et servir l’intérêt de la société européenne. Les intérêts commerciaux ne peuvent à eux seuls être mis sur un pied d’égalité avec l’intérêt général, qui inclut également les intérêts des travailleurs, des citoyens, des consommateurs et l’environnement.
La réglementation doit retrouver son rôle d’assise pour les citoyens européens. La réglementation représente avant tout un investissement dans la prospérité partagée de nos sociétés et dans notre avenir, et ne peut être réduite à des charges et à des coûts.
Il importe que le programme pour une meilleure réglementation respecte les valeurs, les principes et objectifs fondamentaux de l’UE tels que définis par les traités. « Dans la définition et la mise en œuvre de ses politiques et actions, l’Union prend en compte les exigences liées à la promotion d’un niveau d’emploi élevé, à la garantie d’une protection sociale adéquate, à la lutte contre l’exclusion sociale ainsi qu’à un niveau élevé d’éducation, de formation et de protection de la santé humaine. »
La durabilité et la démocratie doivent primer. Il importe que les analyses d’impact considèrent les aspects économiques, sociaux et environnementaux avec le même niveau d’analyse détaillée et de précision, en tenant compte des données tant qualitatives que quantitatives. Des évaluations approfondies sont nécessaires afin de garantir que les décideurs disposent d’une base solide d’éléments d’information pour prendre des décisions éclairées. Toutefois, il faut éviter que ces évaluations devancent le débat démocratique ou restreignent la marge de manœuvre législative du Parlement et du Conseil ainsi que des partenaires sociaux européens.
La décision unilatérale d’introduire un mécanisme « un ajout, un retrait » représente un revirement complet dans la direction politique de la Commission européenne. L’approche n’est aucunement étayée dans les traités, elle manque totalement de données factuelles et n’a été précédée d’aucune consultation. Elle est inappropriée pour l’élaboration du droit de l’UE et risque de créer une pression de déréglementation.
I. Le projet européen comme investissement d’avenir
L’Union européenne a été créée pour promouvoir la paix, les valeurs fondamentales et le bien-être de ses citoyens. Le projet européen est un investissement pour la prospérité partagée de nos sociétés et pour notre avenir. Un acte législatif européen peut permettre de fixer des normes communes et de combler les écarts entre les 27 ordres juridiques nationaux au sein du marché intérieur de l’UE. Si une législation de qualité ouvre la voie au progrès économique, social et environnemental, elle garantit aussi la cohésion et le respect de la diversité dans l’Union.
Une réglementation de qualité est une législation qui assure l’équité, la sécurité juridique et l’efficacité. Afin d’apporter une valeur ajoutée aux citoyens, la législation européenne doit servir les intérêts du plus grand nombre. Une législation de qualité va au-delà des simples intérêts commerciaux, car elle considère l’intérêt général de manière égale, y compris les intérêts des travailleurs, des consommateurs, des citoyens et l’environnement.
Les gains à moyen et à long terme que génère une législation de qualité en tant qu’investissement compensent ses coûts à court terme. Il est essentiel qu'une telle législation tienne compte d’emblée de considérations sur la durabilité inclusive et des avantages généraux pour la société plutôt que de s’engager dans des estimations biaisées sur la manière d’éliminer les charges et les coûts à tout prix.
Une législation de qualité est une réglementation proportionnée, nécessaire et capable d'atteindre ses objectifs, et qui respecte les compétences conférées, la subsidiarité, les droits humains et les processus démocratiques, conformément aux dispositions des traités. Elle garantit la transparence, la responsabilité, l’élaboration de politiques fondées sur des données probantes, l’interaction des parties prenantes, le dialogue social et la négociation collective.
II. Le revirement du programme pour une meilleure réglementation de la Commission
Depuis sa création, le projet européen a ouvert la voie à un acquis communautaire robuste, consolidé et incorporé dans le droit de l’UE et les ordres juridiques nationaux des États membres. Il appartient à l’Union de maintenir, d’appliquer et de renforcer davantage cet acquis, pour garantir et améliorer le bien-être de ses citoyens.
Toutefois, dès le début des années 2000, on a observé un changement progressif dans le discours sur la réglementation européenne, dans lequel un lien direct est établi entre l’environnement réglementaire et l’ambition de renforcer la compétitivité, la croissance économique, la création d’emplois et les perspectives des PME. Ce changement de perspective, qui déplace l’objectif des avantages à la charge règlementaire, constitue une attaque contre l’acquis communautaire et le projet européen.
Au cours des deux dernières décennies, la Commission a multiplié les initiatives pour institutionnaliser la réduction des charges et des coûts en tant qu’objectif autonome. Citons parmi elles le programme pour une meilleure réglementation, le Comité d’examen de la réglementation, le programme pour une réglementation affûtée et performante (REFIT), ainsi que la plateforme REFIT et sa plateforme remodelée Prêts pour l’avenir qui inclut une dimension « prospective stratégique ».[1] Au-delà de ces stratégies, organes et outils existants, les efforts déployés pour l’amélioration de la réglementation ont abouti à l’annonce récente d’une logique « un ajout, un retrait ».
Juste après son élection en 2019, la présidente de la Commission Ursula von der Leyen a annoncé son intention d’approuver le programme révisé pour une meilleure réglementation en y ajoutant le mécanisme « un ajout, un retrait » au titre duquel « chaque proposition législative qui génère une nouvelle charge doit délester les citoyens et les entreprises d’une charge équivalente au niveau de l’Union dans le même domaine d’action ». Étonnamment, cette mesure ne figurait ni dans les orientations politiques ni dans le discours d’Ursula von der Leyen devant le Parlement européen le jour de son élection. Ce n’est que par la suite que ce nouveau mécanisme a été ajouté aux méthodes de travail de la nouvelle Commission et intégré dans toutes les lettres de mission aux commissaires.[2]
L’approche « un ajout, un retrait » représente un revirement complet dans la direction politique de la nouvelle Commission. En fait, l’idée d’un tel instrument avait été discutée, mais rejetée avec force et conviction en 2017 par le précédent premier vice-président de la Commission, Frans Timmermans, qui l’avait trouvée injustifiée et avait déploré son manque de données probantes. Elle avait été jugée inappropriée pour l’élaboration du droit européen, car elle risquait de créer une pression dérégulatrice.[3] De même, la référence aux objectifs de réduction avait été rejetée en raison de son inadéquation dans le contexte européen.
En tant qu’outil méthodologique supposé, le « un ajout, un retrait » peut être exploité de multiples façons, ce qui soulève des préoccupations au lieu d’instaurer de la confiance. Il pourrait se traduire par l'adoption d’approches totalement dérégulatrices selon lesquelles toute nouvelle proposition législative doit s’accompagner de l’abrogation d’un texte législatif existant, ou par des calculs visant à compenser les coûts estimés d’une nouvelle législation en générant un montant équivalent d’économies grâce à la suppression des charges administratives, de conformité ou autres identifiées. En tant que telle, la proposition « un ajout, un retrait » est inappropriée pour l’élaboration du droit européen et risque de créer une pression dérégulatrice.
III. Vers un programme pour une meilleure réglementation digne de ce nom
Le programme pour une meilleure réglementation ainsi que le mécanisme annoncé du « un ajout, un retrait » constituent une menace directe pour l’acquis communautaire en tant que tel, mais aussi pour l’ensemble de l’ordre juridique européen avec toutes les valeurs, tous les principes, objectifs, processus et structures de gouvernance qu’il implique. Leur approche se fonde sur une logique selon laquelle la réglementation est réduite à une charge et à un coût pour certains groupes de la société, les entreprises en premier lieu.
L’introduction du mécanisme « un ajout, un retrait » révèle non seulement une position selon laquelle la législation est jugée de facto contraignante et coûteuse, mais aussi une suspicion à l’égard de la législation en tant que telle. Sans autre justification, cette logique radicale implique qu’une analyse au cas par cas de l’acquis européen serait inefficace et obsolète.
L’initiative d’un mécanisme « un ajout, un retrait » n’a aucune légitimité, car elle n’a été précédée d’aucune analyse d’impact ou consultation. Elle repose sur une base factuelle inexistante et son approche mécanique s’accompagne d’objectifs de réduction quantitative, au lieu de se focaliser sur la qualité de la réglementation et sur ses mérites. La décision unilatérale d’introduire un tel instrument est radicale, voire incohérente par rapport aux propres procédures d’évaluation internes de la Commission. Rien ne prouve que ce mécanisme satisferait aux exigences d’efficacité et d’efficience qui sont en soi essentielles au programme pour une meilleure réglementation. Le concept ne repose pas sur une vision commune de ce à quoi devraient ressembler un processus législatif et une gouvernance de qualité dans l’ordre juridique européen. Cela risque d'affecter l'équilibre institutionnel et c’est incompatible avec les priorités politiques, les objectifs, les principes et les valeurs fondamentales de l'UE contenus dans les Traités.
L’approche « un ajout, un retrait » ne peut en aucun cas être considérée comme un concept objectif, scientifique ou juridique. Elle ne constitue pas un principe, et ne trouve en aucun cas de fondement dans les traités.
Le programme pour une meilleure réglementation nécessite un changement profond afin que l’Union réponde aux besoins de ses citoyens et obtienne leur soutien. Le dogme de gouvernance par les nombres, les coûts et le court-termisme doit être abandonné au profit d’une approche plus qualitative de la règlementation en tant qu’investissement à long terme pour le bien commun de la société. Ce n’est qu’en veillant à ce que les considérations économiques, sociales et environnementales soient évaluées sur un pied d’égalité et avec le même niveau de détail que l’UE pourra garantir une approche plus inclusive, durable et impartiale de l’élaboration des lois.
Une révision de l’accord interinstitutionnel de l’UE visant à mieux légiférer serait essentielle pour définir une approche plus objective de la règlementation européenne et remédier aux déséquilibres de l’actuel programme pour une meilleure réglementation. Une renégociation devrait permettre d’accorder plus d’importance aux aspects qualitatifs de la méthodologie, pour réaliser des analyses d’impact plaçant les considérations de durabilité inclusive au centre d’une approche renouvelée. Il est impératif que l’intérêt général et le bien-être des personnes figurent au cœur de cet accord qui définit les règles de coopération entre la Commission, le Conseil et le Parlement, tout en garantissant la transparence, la responsabilité et le contrôle démocratique tout au long du processus législatif de l’UE.
Globalement, un programme pour une meilleure réglementation digne de ce nom devrait être guidé par le respect et la promotion des valeurs fondamentales, des principes et objectifs de l’UE tels qu’ils sont ancrés dans les traités.
IV. Règlementation respectant les valeurs fondamentales de l’UE
L’Union est fondée sur l’État de droit, la démocratie et le respect des droits humains. Avec la dignité humaine, la liberté, le pluralisme, la tolérance, la solidarité, la justice, la non-discrimination et l’égalité, ces valeurs constituent les valeurs fondamentales de l’UE, telles qu’établies par l’article 2 du TUE. L’Union s’est engagée à respecter et à promouvoir ces valeurs dans l’exercice de ses compétences. De même, l’Union et ses États membres sont liés par la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne lorsqu’ils agissent dans le cadre du droit communautaire.
i) L’État de droit comme condition préalable à l’instauration de la confiance dans le projet européen
L’État de droit est au cœur de l’ordre juridique européen et constitue une condition préalable au bon fonctionnement de toute société démocratique. Il régit et contrôle l’utilisation des pouvoirs publics, garantissant l’impartialité, la responsabilité, la prévisibilité et l’égalité devant la loi. Respecter l’État de droit est essentiel pour que les citoyens accordent leur confiance aux institutions publiques en temps de crise comme en temps normal.
Pour promouvoir une économie durable, équitable et compétitive, il est capital que l’Europe soit gouvernée par l’État de droit qui se trouve au cœur du fonctionnement du marché intérieur européen et de ses règles du jeu équitables. Les forces du marché ne peuvent pas prévaloir sur la loi. Les modèles économiques et les intérêts commerciaux ne doivent pas saper la sécurité juridique des travailleurs ni justifier une application laxiste de la loi.
L’UE a le devoir d’élaborer et d’adopter un discours positif sur la réglementation comme instrument de l’État de droit. La législation a le potentiel de susciter et de légitimer les changements sociétaux nécessaires. Un engagement commun entre les institutions européennes, les États membres, les partenaires sociaux, les citoyens et les autres parties prenantes est indispensable pour relever avec succès les défis économiques, sociaux et environnementaux qui nous attendent. Les initiatives phares de l’UE telles que le Green Deal, le socle européen des droits sociaux et les objectifs de développement durable nécessitent des investissements ambitieux en termes de ressources et de législation de qualité.
La réglementation de l’UE doit être en mesure de servir l’intérêt général. Les intérêts individuels tels que les intérêts commerciaux ne peuvent être mis sur un pied d’égalité avec l’intérêt public. Si l’Union n’est au service que de quelques privilégiés, elle ne pourra gagner le soutien du plus grand nombre. Formuler des hypothèses trop hâtives selon lesquelles le droit de l’UE est généralement coûteux et représente une charge lourde pour les entreprises et les citoyens aura pour seule conséquence de susciter des attaques institutionnelles internes contre l’UE, susceptibles d’alimenter les seuls arguments des eurosceptiques.
ii) Les droits humains et leur incompatibilité avec une logique des charges et des coûts
Les droits humains sont inviolables et normativement fondamentaux pour la société, car ils jettent les bases de la protection et de la solidarité. En ce sens, ils peuvent limiter ou justifier une action législative. Assurer le respect des droits humains impose non seulement au législateur de ne pas intervenir plus que nécessaire dans la vie des citoyens, mais cela nécessite également des actions positives pour protéger et promouvoir la dignité humaine. À cet égard, la nature même des droits humains, qu’ils soient individuels ou collectifs, impose également des obligations aux interlocuteurs concernés, qu’il s’agisse d’entités ou de personnes publiques ou privées.
L'UE devrait renforcer son cadre juridique constitutionnel en adhérant à la Convention européenne des droits de l'homme, à la Charte sociale européenne et aux conventions pertinentes de l'OIT, et en les ratifiant, ainsi qu’en conditionnant le droit européen en tant que tel et toute action de l'UE au plein respect et au respect des instruments internationaux juridiquement contraignants en matière de droits de l'homme.
L’UE doit développer une méthodologie pour évaluer en profondeur les impacts de la réglementation sur les droits humains et les valeurs fondamentales. Cependant, une telle analyse d’impact ne doit pas s’appuyer sur une logique axée sur la réduction des coûts et des charges réglementaires et administratives. Les droits humains ne peuvent jamais être une charge. Aucun prix ne peut être donner à la vie humaine et à la dignité. Néanmoins, l’impossibilité de monétiser des intérêts justifiés tels que le respect des droits humains ou la protection de l’environnement ne signifie pas que ceux-ci n’apportent aucune valeur ou qu’ils peuvent être compensés par une analyse économique coût/bénéfice à court terme. Une meilleure méthodologie pour les évaluations d’impact de la réglementation européenne devrait au contraire se fonder sur une analyse qualitative multi-critères, dans laquelle les aspects sociaux et environnementaux revêtent la même importance que les considérations économiques. Une analyse approfondie des implications pour les droits humains devrait être menée avec la contribution des autorités, des défenseurs des droits humains et des chercheurs de premier plan dans ce domaine.
Les droits humains sont importants dans la vie quotidienne comme au travail, mais ils sont particulièrement mis à l’épreuve en période de crise. Le dérèglement climatique, les inégalités persistantes, la récession économique et la pandémie de COVID-19 nous rappellent tous que le respect des droits humains, la santé publique et la protection de l’environnement doivent rester prioritaires dans l’agenda politique de l’UE et être défendus en permanence.
iii) Démocratie légitimant la discrétion des législateurs
Les processus et institutions démocratiques sont essentiels pour contrôler l’exercice des pouvoirs et instaurer la confiance dans l’UE. Le processus décisionnel démocratique ouvre la voie à l’équité, à la transparence et à la responsabilité tout au long du processus législatif. Plus le système de gouvernance européen sera démocratique, plus l’Union sera inclusive, égalitaire et légitime. Étant donné que la démocratie est fondamentale pour la crédibilité de l'ensemble du projet européen, il en va de même pour le respect du rôle des acteurs démocratiques, y compris des syndicats.
La méthodologie utilisée pour évaluer les impacts de la réglementation européenne doit être conçue dans le respect des particularités de l’Union et de son ordre juridique. Le droit d’initiative revient à la Commission, tandis que les pouvoirs législatifs appartiennent au Conseil et au Parlement en tant que colégislateurs. Alors que la Commission peut évaluer l’impact de différents scénarios avant de soumettre une proposition, les colégislateurs restent libres de modifier celle-ci. Ces amendements et négociations cumulatifs basés sur le « donnant-donnant » sont parfois indispensables pour parvenir à une vision et un accord commun. Il s’ensuit que chaque compromis politique a son prix et s’inscrit dans un processus législatif, notamment pour trouver un équilibre entre les différents intérêts et forces en présence dans un système politique démocratique.
La composition et les méthodes de travail actuelles du Comité d’examen de la réglementation (RSB) ne sont toutefois pas appropriées pour évaluer objectivement et adéquatement les initiatives lancées dans divers domaines politiques. En tant qu’organe non élu, le RSB n’est censé exercer que des fonctions de contrôle de qualité. Il importe qu’il ne puisse opposer son veto à une analyse d’impact ou mettre fin à une initiative de la Commission, car il nuirait ainsi au processus législatif démocratique. Pour assurer la cohérence et la transparence, les avis du RSB devraient toujours être rendus publics et joints à la proposition de la Commission lors de sa publication.
Le programme pour une meilleure réglementation doit permettre aux colégislateurs de prendre des décisions éclairées. Toutefois, par ses analyses d’impact, la Commission ne doit pas tenter de devancer le débat démocratique ou de réduire la discrétion législative du Conseil et du Parlement, en référence à un dogme basé sur la réduction des coûts et des charges. Une telle tentative d’ingérence dans les décisions démocratiques accroît la bureaucratie, ralentit le processus et rend plus difficile la conclusion d’un accord politique. Si le processus législatif de l’UE n’a pas besoin de plus d’analyses d’impact, il nécessite en revanche davantage de responsabilité et de transparence, y compris en ce qui concerne les négociations en trilogue et l’accès aux documents. Il faut éviter que les parties négociatrices qui font obstacle au processus législatif ou n’assument pas de responsabilité politique puissent se cacher derrière la confidentialité, et faire en sorte de publier des informations sur les raisons de leur blocage pour sauvegarder la responsabilité démocratique.
La Commission agit dans l’intérêt général de l’Union lorsqu’elle exerce son droit d’initiative. À cet égard, le programme pour une meilleure réglementation doit également permettre à la Commission d’exercer son pouvoir discrétionnaire. Une approche trop restrictive de la réduction des charges et des coûts ou un exercice de comptabilisation basé sur l’approche « un ajout, un retrait » peut éloigner la Commission de ses responsabilités politiques eu égard à une réglementation de qualité, et la pousser vers la poursuite d’objectifs quantitatifs. Un système de compensation « un ajout, un retrait » peut conduire la Commission à reporter l’abrogation de législations obsolètes pour des raisons politiques afin de constituer une réserve de charges potentielles à éliminer ultérieurement à mesure que de nouvelles propositions législatives seront formulées, plutôt que de les éliminer en une seule fois. Une approche au cas par cas est plus appropriée et risque moins d’entraîner des retards en raison d’objectifs bureaucratiques, monétaires ou chiffrés supplémentaires.
Le programme pour une meilleure réglementation devrait permettre de revoir et améliorer les mécanismes de consultation publique appliqués par la Commission pour renforcer les données probantes. Afin d’accroître l’efficacité dans la collecte de ces données, les consultations doivent garantir une plus grande représentativité parmi les répondants, tout en veillant à ce que les différentes réponses soient correctement pondérées en fonction de leur représentativité. Dans la pratique actuelle, toutes les réponses sont pondérées de manière égale, qu’elles représentent des intérêts individuels ou collectifs. Souvent, seul un petit nombre de répondants – et la plupart du temps les mêmes – participent à ces consultations. Pour générer des données plus représentatives, il serait bon de formuler les questions de manière objective et non binaire, pour permettre aux répondants d’élaborer des réponses plus nuancées. De même, les consultations devraient ouvrir la voie à une collecte de données plus qualitative, centrées également sur les avantages potentiels de la réglementation. Les approches quantitatives telles que l’invitation des répondants à identifier les coûts potentiels biaisent la consultation, d’autant plus que les obstacles rencontrés par certaines parties prenantes peuvent même ne pas être quantifiables en termes monétaires, comme les violations des droits humains.
Dans le cadre du dialogue social institutionnel, les initiatives politiques dans le domaine social doivent être précédées d’une consultation formelle des partenaires sociaux conformément aux traités. L’ambition de la Commission de consulter plus largement ne doit pas affaiblir, et en aucun cas remplacer, cette prérogative des partenaires sociaux. Comme le prévoit l’article 154 du TFUE, la Commission consultera les partenaires sociaux sur l’orientation possible à donner à une telle action de l’UE. Une initiative de politique sociale ne peut pas être soumise à une consultation publique avant une telle consultation des partenaires sociaux.
Un dialogue étroit avec les parties prenantes est crucial pour garantir une réglementation européenne qui soit adaptée à l’objectif et de grande qualité. Dans cette perspective, la Commission devrait veiller à ce que le Comité économique et social européen et le Comité européen des régions soient dûment consultés, dans le cadre des procédures de consultation des parties prenantes institutionnelles déjà existantes en vertu des traités, avant et pendant le processus législatif.
V. Règlementation respectant les principes fondamentaux de l’UE
Les compétences législatives de l’Union sont régies par les principes d’attribution, de subsidiarité et de proportionnalité, tels que définis à l’article 5 du TUE. Ces principes font partie du cadre constitutionnel européen qui régit non seulement la portée et les limites de la réglementation européenne, mais aussi le moment et la manière dont l’UE peut exercer ses pouvoirs de réglementation.
i) Des compétences conférées comme source de légitimité
Les compétences de l’Union proviennent des États membres. Alors que l’UE ne peut agir que dans les limites des compétences qui lui sont conférées, les législateurs nationaux jouissent d’une plus large marge d’action, disposent d’un plus vaste éventail d’instruments et sont plus à même de créer des synergies dans différents domaines politiques.
Le programme pour une meilleure réglementation doit être révisé dans le respect de la structure de gouvernance européenne. Un engagement et une propriété partagés aux niveaux européen et national sont nécessaires pour permettre la réussite de toute approche visant à mieux légiférer. À elle seule, cette raison explique déjà qu’une logique quantitative basée sur la réduction des charges et des coûts est inappropriée. L’architecture multi-niveaux et multi-institutions du projet européen rend difficile l’évaluation de certains coûts et bénéfices de la réglementation, non seulement parce que les propositions législatives peuvent être modifiées au cours du processus démocratique, mais aussi parce que le droit de l’UE doit être mis en œuvre et appliqué dans chaque État membre. De même, la difficulté d’accéder à des ensembles comparables de données fournis par tous les États membres rend immédiatement moins fiable ou plus contraignante toute tentative d’analyse des coûts.
Les analyses d’impact de la Commission sont avant tout censées permettre l’identification de l’instrument réglementaire le plus approprié et efficace dans la boîte à outils de l’UE. Les objectifs de réduction des coûts ont déjà été rejetés par la Commission précédente qui les a jugés mal adaptés, et ils ne peuvent légitimement pas être utilisés comme critère pour identifier un instrument européen adéquat. De même, la réduction des charges n’est pas un objectif légitime visant à donner la priorité à une législation non contraignante, à l’autorégulation ou aux règlements européens plutôt qu’aux directives, comme moyen d’éliminer les risques de coûts supplémentaires encourus par la transposition nationale.
Pour les mêmes raisons, toutes les références au « plaqué or » (gold plating) doivent être abandonnées. Une telle approche est contraire au droit constitutionnel qu’ont les États membres de compléter les normes minimales établies au moment de transposer les directives européennes dans la législation nationale. C’est en particulier le cas dans des domaines tels que la politique environnementale et sociale où l’on entend assurer des normes plus élevées que celles prévues par la législation européenne.
Le programme pour une meilleure réglementation doit non seulement garantir que les normes établies par l’acquis de l’UE sont conservées, mais aussi veiller à ce que les normes minimales ne soient pas transformées de facto en normes maximales.
Les instruments juridiques de l’UE ne doivent en aucune manière nuire à l’exercice des droits fondamentaux, y compris le droit de grève et d’action collective ou le droit de négocier, de conclure et d’appliquer les conventions collectives conformément aux lois et pratiques nationales. Toute nouvelle initiative législative européenne dans le domaine de la politique sociale doit garantir le plein respect des systèmes nationaux de relations industrielles, des divers modèles de marché du travail et de l’autonomie des partenaires sociaux.
« Mieux légiférer », c’est aussi reconnaître que les libertés économiques en vertu du droit européen ont des limites et ne peuvent être placées sur un pied d’égalité avec les droits fondamentaux. En cas de conflit, les droits fondamentaux des travailleurs, les droits sociaux et syndicaux doivent prévaloir sur les libertés économiques. Cette primauté doit être garantie dans l’ensemble du droit et des politiques européens, y compris par l’inclusion d’un protocole de progrès social, en cas de modification du traité.
Il importe de respecter les compétences conférées aux partenaires sociaux européens au titre du chapitre sur la politique sociale dans les traités. Conformément à l’article 155 du TFUE, les partenaires sociaux européens peuvent conclure des accords, à transformer en directives européennes. Dans ses actions, la Commission doit respecter l’autonomie des partenaires sociaux et la nature spécifique des accords conclus par ces derniers. À cet égard, le programme pour une meilleure réglementation et la logique « un ajout, un retrait » ne peuvent s’appliquer, car une telle ingérence nuirait à l’autonomie des partenaires sociaux ainsi qu’aux résultats équilibrés obtenus dans ces négociations.
ii) Subsidiarité et coût de la non-Europe
Le principe de subsidiarité prévoit que l’Union n’agit que dans la mesure où les États membres ne peuvent pas mieux atteindre un objectif donné. Dans ce contexte, la subsidiarité peut servir de limite ou de justification à l’action de l’UE. Généralement, une intervention au niveau européen peut être justifiée par la volonté de réglementer des intérêts partagés, des défis communs ou des questions transfrontalières concrètes.
Il importe de respecter le principe de subsidiarité dans le programme pour une meilleure réglementation et ses méthodes de travail, non seulement en se demandant si les questions peuvent être traitées plus efficacement par les États membres au moyen de réglementations ou par les partenaires sociaux au travers des conventions collectives, mais aussi en examinant le coût de la non-Europe. La Commission doit abandonner l’idée qu’un nombre plus restreint de réglementations permet de faire des économies. De la même manière que la réglementation européenne peut entraîner des coûts justifiés, l’inaction de l’UE peut engendrer des coûts supplémentaires ou la perte d’opportunités.[4] L’absence de réglementation européenne peut très bien entraver le fonctionnement du marché intérieur. La suppression d’un texte législatif européen implique le risque de voir émerger 27 réglementations nationales, plutôt qu’un gain majeur en termes de réduction des coûts ou charges.
iii) Proportionnalité guidant l’évaluation des avantages nets et de la réglementation nécessaire
Le principe de proportionnalité régit la manière dont l’Union peut exercer ses compétences législatives. Par conséquent, le contenu et la forme de l’action européenne ne dépasseront pas ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs fixés par les traités. Il est clair que les coûts réglementaires sont loin d’être les seuls aspects à prendre en considération lorsqu’il s’agit de déterminer si une réglementation particulière de l’UE est proportionnée, et certainement pas parmi les objectifs identifiés par les traités.
Pour s’assurer que la réglementation de l’UE est nécessaire, justifiée et proportionnée, le programme pour une meilleure réglementation doit être révisé du point de vue de la qualité des avantages nets plutôt que de la quantification des coûts. Les coûts et charges ne peuvent être évalués correctement s’ils ne sont pas mis en relation avec les avantages qu’ils offrent. Pour qu’une mesure soit considérée comme proportionnée, les avantages qu’elle génère doivent être supérieurs aux désavantages qu’elle entraîne, qu’il s’agisse de bénéfices monétaires ou non quantifiables, matériels ou immatériels, à condition qu’ils servent les objectifs de l’UE et profitent à tous. À l’inverse, une analyse d’impact approfondie doit également être menée pour toute abrogation potentielle afin d’éviter des conséquences inattendues et des effets indésirables.
Conformément au principe de proportionnalité, il convient de considérer qu’une charge ou un coût est justifié par une raison particulière, par exemple la stimulation d’un comportement souhaitable ou d’un changement sociétal. Les coûts et les charges réglementaires sont en tant que tels inhérents à tout système législatif et à tout ordre juridique. Une réglementation peut être perçue différemment selon qu’elle est soutenue par l’entreprise, les travailleurs ou la société dans son ensemble. Différents acteurs peuvent considérer qu’une même réglementation est contraignante ou bénéfique, selon qu’elle entraîne des droits ou des obligations pour eux. Le fait qu’une partie prenante juge certains règlements inutiles ne signifie pas nécessairement que leur existence est injustifiée ou disproportionnée au regard de l’intérêt général. Ce qu’une entreprise voit comme un manque à gagner peut être perçu par la société comme un investissement pour la justice sociale.
Tout objectif chiffré de réduction exprime une dépendance excessive au revenu en tant que mesure des avantages et de la satisfaction. Dans le même temps, ces objectifs présupposent l’existence d’un point de référence, ce qui est particulièrement problématique à envisager lorsqu’il s’agit de l’acquis communautaire d’une Union toujours plus proche. Cette approche comptable risque d’être encore plus compliquée si l’on considère que la logique du « un ajout, un retrait » est censée fonctionner dans un seul et même domaine politique, alors que personne ne sait vraiment comment différents types de charges, coûts et avantages pourraient être calculés, pondérés et comparés pour permettre une compensation équivalente. En outre, on peut supposer que toute nouvelle réglementation de l’UE est nécessaire, tout comme le remplacement d’une ancienne réglementation européenne inutile. Quoi qu’il en soit, il ne peut exister de réserve illimitée de réglementations et coûts superflus, en particulier dans la mesure où la Commission affirme avoir poursuivi avec succès depuis 2012 ses efforts de réduction en termes de charges et de coûts réglementaires.
VI. Réglementation promouvant les objectifs fondamentaux de l’UE
Les objectifs de l’UE sont énoncés à l’article 3 du TUE, selon lequel l’Union « œuvre pour le développement durable de l’Europe fondé sur une croissance économique équilibrée et sur la stabilité des prix, une économie sociale de marché hautement compétitive, qui tend au plein emploi et au progrès social, et un niveau élevé de protection et d’amélioration de la qualité de l’environnement ». De même, l’article 9 du TFUE indique que « dans la définition et la mise en œuvre de ses politiques et actions, l’Union prend en compte les exigences liées à la promotion d’un niveau d’emploi élevé, à la garantie d’une protection sociale adéquate, à la lutte contre l’exclusion sociale ainsi qu’à un niveau élevé d’éducation, de formation et de protection de la santé humaine ». Cette clause sociale horizontale est une obligation majeure qui pèse sur l’UE et donc aussi sur la Commission européenne dans l’exercice de ses pouvoirs.
Les objectifs généraux de l’UE doivent être respectés et promus dans tous les domaines politiques lorsque l’Union exerce ses compétences. Associées à une application efficace, des normes communes élevées ouvrent la voie à une situation équitable caractérisée par la loyauté, la sécurité juridique et l’efficacité. À cet égard, la compétitivité est loin d’être le seul objectif que l’Union doit garantir dans la poursuite de ses politiques.
i) La durabilité doit primer
Le développement durable est au cœur de l’UE et des traités qui reconnaissent la nécessité de traiter ensemble les dimensions économique, sociale et environnementale au lieu de les considérer comme des intérêts opposés et concurrents. Les considérations de durabilité inclusive doivent être intégrées dans tous les domaines politiques. Le développement sociétal doit répondre aux besoins présents sans compromettre la capacité à satisfaire également les besoins futurs.
Le programme pour une meilleure réglementation doit être révisé dans le souci premier de durabilité. Il importe que sa boîte à outils comprenne l’exigence d’intégrer les considérations de développement durable à toutes les étapes de l’élaboration des politiques et du processus législatif européens. Chaque nouvelle initiative de l’UE doit pouvoir démontrer comment elle contribue à la réalisation d’objectifs tels que les objectifs de développement durable, le Green Deal européen et le socle européen des droits sociaux.
Accorder la priorité à la durabilité équivaut à envisager des perspectives à moyen et à long terme, à considérer la réglementation comme un investissement plutôt que comme un coût à court terme. Si les évaluations d’impact doivent se concentrer sur la pertinence et l’analyse des coûts/bénéfices, elles devraient aussi viser à mesurer les effets économiques, sociaux, environnementaux et territoriaux de la réglementation.
L’élaboration d’une législation durable nécessite une base de connaissances et des précautions solides. Le principe de précaution a été inscrit dans les traités (notamment les articles 191 et 193 du TFUE) pour garantir la sécurité, la santé et les droits des personnes. Il invite l’UE et ses États membres à agir avec prudence, notamment lorsqu’il n’existe pas de consensus scientifique pour étayer certaines politiques. Le programme pour une meilleure réglementation devrait permettre de protéger ce principe fondamental et cet objectif. Si l’innovation peut favoriser le progrès, elle peut aussi perturber. Ainsi, l’innovation ne doit pas servir d’argument pour écarter les valeurs fondamentales, les principes et les objectifs de l’Union ou pour saper leur application effective. Comme l’ordre juridique européen ne reconnaît pas l’innovation comme un principe légal, donner la priorité à l’innovation plutôt qu’à la précaution ne peut être légitimement justifié.
De même, il faut éviter que la dimension « prospective stratégique » de la boîte à outils remaniée pour une meilleure réglementation ne se transforme en une nouvelle tentative de renforcer l’innovation au détriment du principe de précaution. Son analyse et sa mise en œuvre doivent être proportionnées et respecter l’intérêt général, en ce compris la nécessité de répondre également aux défis et tendances sociaux. Faire en sorte que la réglementation soit adaptée à l’avenir, c’est avant tout assurer sa durabilité économique, sociale et environnementale.
ii) Établir des normes pour une concurrence loyale et la sécurité juridique
L’objectif de l’UE d’améliorer le bien-être de ses citoyens ne peut être atteint que par une législation de qualité et des normes élevées. En effet, l’UE est mondialement connue pour avoir certaines des normes les plus élevées au monde en termes de droits et de protection. Il faut reconnaître que cela a également un prix. Se focaliser de manière excessive sur la réduction des charges et des coûts risque de brouiller l’enjeu essentiel du débat public portant sur ce que la réglementation européenne offre en retour à la société et à ses citoyens.
Le programme pour une meilleure réglementation doit se débarrasser de l’idée que la compétitivité ne peut être construite que sur la simplification, la réduction de la réglementation et la suppression des coûts réglementaires. La relance du REFIT sous la forme d’une plateforme « Prêts pour l’avenir » devrait permettre de nous extraire du statu quo et garantir une composition plus équilibrée avec une compréhension plus holistique de ce qui rend la réglementation adaptée à l’objectif et aux personnes concernées.
La compétitivité ne doit jamais se fonder sur l’abaissement des normes, car cela n’aboutira qu’à un nivellement vers le bas qui peut se traduire, par exemple, par le dumping social et environnemental. En effet, la concurrence déloyale constitue l’un des obstacles majeurs à une véritable compétitivité, y compris pour les PME. Les exceptions à la réglementation au profit des PME ne stimulent pas la compétitivité, mais risquent plutôt de créer des doubles normes et de favoriser l’entrée sur le marché de concurrents véreux.
À cet égard, il convient de rappeler que des règlements européens tels que l’harmonisation ou la reconnaissance mutuelle peuvent représenter une valeur ajoutée si l’on simplifie les exigences juridiques, techniques et administratives parmi les États membres au lieu d’en ajouter de nouvelles. Cependant, la promotion de la compétitivité, de la croissance économique, des opportunités commerciales et de la création d’emplois nécessite une approche plus holistique respectant l’intérêt général, y compris les intérêts des travailleurs.
Des normes communes peuvent favoriser l’équité, la sécurité juridique et la transparence. Elles peuvent empêcher la concurrence réglementaire entre les États membres ainsi qu’entre l’UE et les pays tiers. La création de règles du jeu équitables promeut l’intérêt général et jette les bases d’une concurrence saine et durable dans le plein respect des exigences économiques, sociales et environnementales.
iii) Une application garantissant la conformité et une réglementation efficace
L’application est essentielle pour faire respecter l’État de droit, garantir une exécution efficace et la conformité à la loi. Sans surveillance et contrôles efficients, une législation de qualité perd son effet utile. En même temps, toute tentative de réduire les coûts ou les charges réglementaires ou administratives risque d’avoir des effets néfastes sur l’efficacité de la loi. Une législation européenne efficace exige un engagement partagé entre l’Union et ses États membres. Les droits et protections prévus par la législation de l’UE n’ont de sens que s’ils sont appliqués. L’absence de conformité nuit à l’égalité des conditions, mais aussi aux objectifs fondamentaux de l’Union.
Le programme pour une meilleure réglementation doit être transformé pour promouvoir une réglementation synonyme de qualité, de loyauté, de sécurité juridique et d’efficacité. Pour y parvenir, il faut également le réviser en mettant davantage l’accent sur une application et un respect de la loi améliorés. Des règles plus simples ne sont pas nécessairement plus faciles à appliquer ou moins chères à contrôler. En fait, les coûts de conformité sont difficiles à prévoir, car ils dépendent des structures d’application, qui peuvent être particulièrement variées au sein du système européen de gouvernance multi-niveaux. Par exemple, contrairement aux initiatives environnementales, les coûts de conformité de la réglementation en matière de santé et de sécurité au travail ont rarement été estimés dans les analyses d’impact de la Commission. À l’inverse, ignorer complètement les coûts d’application rendrait encore moins fiable tout type de calcul coût/bénéfice des différents scénarios disponibles.
Finalement, les efforts réels déployés pour estimer les coûts et les charges sont un exercice coûteux et contraignant pour l’Union, ses États membres et les autres parties prenantes. En conclusion, moins pourrait signifier plus de bureaucratie, moins de qualité, moins de prévisibilité, une concurrence déloyale et une application inefficace. Une telle approche risque de saper les intérêts généraux ainsi que la légitimité du projet européen dans son ensemble. Par conséquent, l’UE mérite un programme pour une meilleure réglementation qui profite à tous.
Annexe: Résolution de la CES« Mieux légiférer » pour tous dans l’UE
[1] Pour plus d’informations générales, y compris sur le développement et le contexte politique de l’initiative « Mieux légiférer », veuillez consulter l’annexe.
[2]Voir par exemple la lettre de mission au vice-président de la Commission chargé des Relations interinstitutionnelles et de la Prospective, Maroš Šefčovič. Lien
[3]Communication de la Commission européenne : Mener à son terme le programme pour une meilleure réglementation : de meilleures solutions pour de meilleurs résultats. Strasbourg, 24.10.2017, COM(2017) 651 final, p. 10. Lien
[4]Voir par exemple Parlement européen (2019) : Carte du coût de la non-Europe 2014-2019. Service européen de recherche du Parlement européen, 2019. Lien