Résolution de la CES sur un plan d'action fiscal sur 3 ans (2025-2027)

Résolution de la CES sur un plan d'action fiscal sur 3 ans (2025-2027) 

Adoptée lors de la réunion du Comité exécutif du 18 juin 2025

 

Reprendre la politique fiscale pour la justice sociale, la solidarité et l'investissement

L'évasion fiscale, la fraude et l'évitement fiscal, ainsi que l'érosion de la coopération internationale en matière fiscale, creusent les inégalités, sapent la cohésion sociale et affaiblissent le financement des services publics. Les progrès de la réforme fiscale au niveau de l'UE continuent d'être bloqués par les règles de l'unanimité et les intérêts nationaux conflictuels. Le climat politique européen actuel, marqué par la montée du nationalisme et le repli fiscal, menace l'équité fiscale. Le mandat européen 2024-2029 sera décisif pour réorienter la politique fiscale vers la solidarité, l'investissement public et une transition juste.

La CES considère la justice fiscale comme un pilier essentiel d'un modèle social européen fort et ambitieux. La transition verte, la création d'emplois de qualité et des services publics solides nécessitent des systèmes fiscaux équitables, progressifs et efficaces. Les travailleurs, sur lesquels repose la charge fiscale la plus lourde, exigent une plus grande transparence de l'impôt sur les sociétés et une action plus forte contre l'évasion fiscale et les paradis fiscaux, à l'intérieur et à l'extérieur de l'UE.

La part du travail dans le revenu n'a cessé de diminuer dans les économies avancées, tandis que les bénéfices des entreprises, les revenus improductifs et les sources de transmission de la richesse ont augmenté, notamment grâce à une fiscalité plus légère que celle du travail. Les gains de productivité n'ont pas été accompagnés d'une augmentation proportionnelle des salaires. Il est temps de plaider pour des salaires plus élevés et pour un véritable système fiscal progressif capable de redistribuer les revenus de manière équitable et efficace, tout en établissant un cadre juridique qui définisse les bénéfices excédentaires et les taxe en conséquence pendant les périodes de ralentissement économique afin de financer les dépenses sociales. 

Cette résolution découle d'un processus de théorie du changement, développé avec les affiliés lors d'ateliers avec les TUSLO à Milan et à Marseille en 2024. Ces sessions ont impliqué une cartographie du pouvoir et une planification stratégique et ont produit un programme clair pour l'action syndicale au cours des trois prochaines années.

 

Agenda stratégique pour 2025-2027

A. Priorités politiques

  • Adoption du cadre fiscal pour les entreprises en Europe (BEFIT), avec un taux minimum effectif d'imposition des sociétés de 25 %.

  • Proposition de directive européenne sur la fiscalité du patrimoine.

  • Préconiser, dans le cadre du travail de la CES sur les marchés publics, de veiller à ce que la révision des directives favorise la négociation collective et les emplois de qualité, et d'exclure les entreprises qui pratiquent l'abus fiscal de l'accès aux marchés publics, ainsi que de toute forme d'aide d'État ou de subvention publique.

Il s'agit des principaux objectifs communs. Les affiliés de la CES sont censés en privilégier un ou plusieurs en fonction de leur contexte national, de leurs priorités internes et des ressources disponibles.

B. Approche stratégique

Pour répondre à la fois à l'exigence d'unanimité au sein du Conseil et à la nécessité d'une coordination européenne, une stratégie commune sera mise en œuvre par le biais d'une coopération étroite entre le secrétariat de la CES et les affiliés. Les activités seront coordonnées de manière opportune et stratégique.

  • Un groupe de travail sur la justice fiscale sera créé. Il définira les priorités de la campagne, les besoins en formation en liaison avec l'ETUI, coordonnera la mise en œuvre et fera rapport au comité économique et au comité exécutif de la CES. Un appel à intérêt sera lancé pour sa composition.

  • La coordination sera renforcée par une plateforme européenne de justice fiscale, qui réunira les syndicats nationaux et les alliés de la société civile en vue d'élaborer des stratégies, de partager des informations et de mener des actions communes.

  • L'objectif principal est d'accroître la visibilité et le leadership des syndicats dans le débat sur la justice fiscale, actuellement dominé par les entreprises et, dans une moindre mesure, par les organisations de la société civile. Les syndicats doivent revendiquer un espace dans le discours public par le biais d'un plaidoyer ciblé et d'une campagne stratégique.

  • L'approche stratégique devrait inclure à la fois des dimensions macroéconomiques et des dimensions au niveau des entreprises, où s'effectue le travail syndical de première ligne. L'évasion fiscale des entreprises réduit non seulement les recettes publiques destinées aux services et aux dépenses sociales, mais permet également à la richesse créée par les travailleurs de se déverser dans des paradis fiscaux. Cela sape le pouvoir de négociation des travailleurs, limite la croissance des salaires et affaiblit le cercle vertueux d'une fiscalité équitable, de services publics solides et de meilleures conditions de travail.

C. Actions clés

  • Renforcer les capacités des dirigeants et des militants syndicaux en matière de communication et de défense de la justice fiscale.

  • Organiser une semaine d'action annuelle des syndicats pour la justice fiscale, alignée sur le semestre européen et les étapes fiscales.

  • Organiser des événements annuels sur la justice fiscale au cours de chaque présidence de l'UE, en collaboration avec les affiliés nationaux.

  • Mener des enquêtes ciblées sur les entreprises qui bénéficient de contrats de l'UE tout en se livrant à des abus fiscaux.

  • Publier un manifeste syndical sur la justice fiscale, engageant la CES et ses affiliés dans une campagne soutenue.

  • Faire pression pour obtenir une directive européenne sur l'imposition des revenus du patrimoine.

D. Indicateurs de progrès

  • Soutien majoritaire au Parlement européen et aux institutions de l'UE pour les propositions relatives à la justice fiscale d'ici à la fin de 2027.

  • Participation active à la campagne d'affiliés d'au moins 10 États membres chaque année.

  • Visibilité accrue des voix syndicales dans les médias et les forums politiques en faveur d'une fiscalité équitable.

La CES et ses affiliés s'engagent pleinement dans cette campagne - pour faire de la politique fiscale un outil d'équité, de solidarité et de durabilité, et pour construire un avenir qui fonctionne pour tous les travailleurs.