L'appel de la CES en faveur d'un changement majeur vers plus d'investissements européens a été soutenu par Draghi, mais les syndicats avertissent que des mesures spécifiques seront nécessaires pour garantir que l'investissement crée des emplois de qualité dans tous les secteurs et toutes les régions.
L'implication des syndicats sera essentielle. Le dialogue social et la négociation collective doivent être au centre de la solution pour la compétitivité européenne. Nous appelons le Président de la Commission européenne à convoquer un groupe de travail des partenaires sociaux pour discuter du rapport et de la voie à suivre.
Une forte orientation syndicale pour les investissements au niveau de l'UE
La CES a depuis longtemps identifié les conséquences pour les travailleurs du sous-investissement chronique dans l'industrie et les services publics. Mario Draghi l'a reconnu dans son rapport sur l'avenir de la compétitivité européenne en recommandant un investissement supplémentaire de plus de 800 milliards d'euros par an.
Cela devrait marquer un tournant dans l'approche de l'UE. La CES soutient fermement une politique industrielle européenne ambitieuse qui soutiendra les biens communs et l'innovation, basée sur des services publics forts, la protection sociale, le logement, le transport et la garde d'enfants. L'UE et les États membres doivent rejeter les politiques d'austérité qui ont échoué et l'UE doit au contraire développer des outils d'investissement communs ambitieux.
Créer des emplois de qualité
Si les recommandations du rapport soulignent à juste titre la nécessité d'investissements massifs pour stimuler la compétitivité, elles ne détaillent pas les mesures nécessaires pour garantir la protection et la création d'emplois de qualité dans tous les secteurs et toutes les régions.
Les investissements ne peuvent pas être un chèque en blanc en ce qui concerne les droits des travailleurs. La CES a plaidé pour que les investissements soient liés à la promotion de la négociation collective comme moyen de créer des emplois de qualité.
Le rapport demande également que tous les travailleurs aient droit à l'éducation et à la formation continue. Cet objectif est à portée de main, mais seulement avec des investissements suffisants et des initiatives législatives pour garantir le droit à la formation. Une directive européenne visant à soutenir une véritable implication des syndicats dans l'anticipation et la gestion du changement pour les transitions verte et numérique de l'Europe sera décisive.
Éviter un nivellement par le bas
Il est positif que le rapport confirme que l'Europe ne peut gagner en compétitivité par la répression salariale et que l'investissement est le moyen de stimuler la productivité.
Toutefois, la CES est très préoccupée par la résurgence de l'agenda de la déréglementation, en particulier l'appel à l'"autolimitation" de l'UE et les arguments erronés contre le "gold-plating". Ces arguments sont susceptibles de porter atteinte à des droits essentiels. Les règles de protection garantissent des conditions de concurrence équitables et une économie résiliente, de haute qualité et à l'épreuve du temps, basée sur l'innovation, et ne devraient pas être considérées comme un frein à la compétitivité.
La CES demande à la Présidente de la Commission, Mme von der Leyen, d'établir un groupe de travail de haut niveau des partenaires sociaux sur la manière de mettre en œuvre une politique industrielle européenne pour des emplois de qualité, ainsi que d'autres recommandations. L'Europe sociale et l'Europe compétitive sont les deux faces d'une même pièce.
Esther Lynch, secrétaire générale de la CES, a déclaré :
"Les preuves sont là. Tous les acteurs pointent dans la même direction. L'UE va-t-elle prendre le taureau par les cornes et inverser la tendance au sous-investissement ?
"L'Europe ne gagnera pas une course vers le bas en matière de déréglementation. Notre avantage en matière d'innovation repose sur les compétences élevées de la main-d'œuvre européenne et sur les emplois à forte valeur ajoutée qu'elles attirent.
"Il est essentiel d'investir dans la main-d'œuvre en offrant des possibilités de formation qui renforcent les compétences des personnes et des emplois de qualité qui motivent les travailleurs à jouer un rôle actif dans la promotion de l'innovation.
"L'anticipation et la gestion du changement pour parvenir à une Europe compétitive sont essentielles. Cela signifie qu'il faut renforcer les négociations collectives. L'UE doit utiliser tous les leviers pour aider les États membres à atteindre l'objectif de 80 % de travailleurs couverts par une convention collective.
"Des emplois de qualité, avec un salaire équitable et de bonnes conditions de travail, le dialogue social et la négociation collective sont au cœur de la compétitivité. Il est positif que le rapport Draghi reconnaisse que l'Europe ne devrait pas essayer de rivaliser dans un nivellement par le bas des salaires. Toutefois, nous devons veiller à ce que les investissements soient assortis de conditions afin de garantir des emplois de qualité et le progrès social.
L'accent mis sur la déréglementation dans le rapport doit être rejeté, y compris toutes les attaques contre le "gold-plating". Nous avons besoin d'un environnement réglementaire qui protège les travailleurs et les droits syndicaux.