Chers ambassadeurs, chères ambassadrices,
Je m'adresse à nouveau à vous au nom de la Confédération européenne des syndicats, qui représente les intérêts des travailleurs à travers l'Europe.
Il ressort de nos échanges et lettres passés que, depuis 2019, nous sommes profondément préoccupés par l'état des conditions de travail dans l'économie de plateforme et par le problème croissant du faux travail indépendant. Avec une proposition de directive visant à améliorer les conditions de travail dans l'économie de plateforme, nous avons fixé un objectif européen commun pour déterminer correctement le statut d'emploi des personnes travaillant par l'intermédiaire de plateformes numériques de travail et protéger tant les droits des travailleurs que des indépendants afin d'exploiter le potentiel de création d'emplois de qualité dans les plateformes.
Au vu de l'état d'avancement des négociations du trilogue concernant la question centrale, le statut d'emploi, nous craignons qu'au lieu d'améliorer la situation actuelle, le Conseil ne mette en place une série d'obstacles à l'objectif que les travailleurs obtiennent justice.
Aujourd'hui, pour obtenir une reclassification vers leur statut d'emploi correct, les travailleurs et/ou leurs représentants doivent s'adresser à la Cour dans le pays où la relation de travail est basée, et les procédures sont basées sur le droit national. Bien qu'il faille noter que, dans l'écrasante majorité des cas, ces actions en justice aboutissent à des résultats favorables pour les travailleurs, il ne s'agit pas d'un système idéal, car il dépend des ressources (sensibilisation, connaissances, argent et temps) du côté des travailleurs vulnérables.
La position du Conseil ajouterait même une étape supplémentaire à ce processus, à savoir la condition préalable de satisfaire à trois critères sur sept pour déclencher la présomption de relation de travail, et ce, sans transférer la charge de la preuve aux plates-formes.
Après avoir déclenché la présomption de la relation d'emploi, les travailleurs devraient attendre et défendre à nouveau leur détermination correcte du statut, dans ce qui serait une deuxième procédure - cette fois sous la forme d'une réfutation, où la charge de la preuve serait correctement transférée à la plateforme.
Nous vous demandons instamment de prendre en considération la position du Parlement Européen, qui n'opère pas une reclassification automatique mais améliore efficacement la procédure d'accès aux droits des travailleurs pour tous les travailleurs des plateformes, tout en protégeant le droit des travailleurs véritablement indépendants et le droit de la plateforme de réfuter la présumption lorsqu'elle la juge injustifiée.
En outre, nous réitérons notre forte opposition à la création d'une troisième catégorie de travailleurs. Tous les travailleurs doivent être traités sur un pied d'égalité. Nous ne pouvons pas renoncer aux droits et à la protection des travailleurs pour assurer la rentabilité de certains modèles d'entreprise. Toutes les plateformes responsables en Europe souffriront d'une concurrence déloyale irréversible si nous autorisons les droits des travailleurs à la carte, en sapant le droit à la sécurité sociale et les obligations fiscales.
Enfin, une négociation collective forte et un accès à la représentation pour tous les travailleurs de l'économie de plateforme doivent être garantis dans l'ensemble de la directive. Ce faisant, vous contribuerez à une économie européenne plus juste, plus équitable et plus compétitive, objectif qui a été constamment répété dans les conclusions des sommets de l'UE.
Avec nos syndicats dans chaque État membre, nous restons disponibles pour tout échange, et nous comptons sur vous pour prendre des mesures en vue d'une directive forte qui protège les droits des travailleurs et établit des règles du jeu équitables dans l'économie de plateforme.
Je vous prie d'agréer, Madame, Monsieur, l'expression de mes salutations distinguées,
Ludovic Voet
Secrétaire confédéral