Bruxelles, 02/05/2013
Merci Président de m’avoir invitée à m’adresser au collège des commissaires aujourd’hui.
C’est une occasion exceptionnelle dont j’entends profiter pleinement. D’où la vigueur et la clarté de mon de mon message;
C’est un message d’urgence que je vous apporte, message qui s’exprime très clairement dans la déclaration unanime sur la dimension sociale, approuvée par le Comité exécutif de la CES le 23 avril dernier. Ce message est entre vos mains.
La CES a toujours soutenu le projet européen; pour de nombreuses raisons, mais essentiellement parce que ce modèle d’intégration régionale n’avait pas seulement un but d’intégration commerciale, mais devait avoir un objectif de progrès social et de plein emploi. La CES a insisté sur ce point à de nombreuses reprises au cours des années passées.
La CES a toujours soutenu le projet européen; pour de nombreuses raisons, mais essentiellement parce que ce modèle d’intégration régionale n’avait pas seulement un but d’intégration commerciale, mais devait avoir un objectif de progrès social et de plein emploi. La CES a insisté sur ce point à de nombreuses reprises au cours des années passées.
Il y a un an nous avons présenté notre projet de contrat social pour l’Europe; il était clair pour nous que les politiques mises en place étaient en train de démanteler le modèle social européen, au lieu de le soutenir.
Lorsque nous avons présenté notre projet de contrat social nous savions que le soutien populaire était ébranlé. Et nous tirions la sonnette d’alarme.
Au cours des dernières années, il n’y a eu aucune initiative sociale de l’UE : pas de programme social, pas de programme sur la santé et la sécurité; pas d’initiative sur les restructurations –malgré la demande du Parlement européen.
En ce moment les services de la Commission identifient des directives essentielles comme l’information et la consultation, le congé parental, le détachement des travailleurs, comme étant une charge inutile. Les lois sociales sont considérées par les leaders politiques comme un obstacle à la compétitivité. Anticipant les réactions du Conseil, la Commission renonce à toute initiative sociale. Ce n’est pas la bonne formule.
En ce moment les services de la Commission identifient des directives essentielles comme l’information et la consultation, le congé parental, le détachement des travailleurs, comme étant une charge inutile. Les lois sociales sont considérées par les leaders politiques comme un obstacle à la compétitivité. Anticipant les réactions du Conseil, la Commission renonce à toute initiative sociale. Ce n’est pas la bonne formule.
Pour nous des standards sociaux minimaux doivent faire partie intégrante de la dimension sociale dont nous parlons aujourd’hui.
Sans ces standards la base sociale de l’UE apparaît ténue et imperceptible.
Mais l’effritement du soutien syndical et populaire à l’UE a des fondements encore plus graves.
Les politiques imposées par la Troïka en Grèce, en Espagne, au Portugal, et généralement les politiques macroéconomiques imposées par le « six pack » ont eu un seul et unique objectif : les réformes structurelles ; elles ont fait porter aux gens ordinaires tout le poids de l’ajustement ; Les inégalités ont augmenté, la pauvreté aussi; les services publics ont été affaiblis, tout comme la protection sociale.
Et nous n’avons pas vu d’initiative pour la croissance et l’emploi. Nous n’avons pas vu d’initiative contre l’évasion et l’évitement fiscal. J’y reviendrai tout à l’heure. Un point positif a été l’élan donné à la taxe sur les transactions financières.
Les dégâts ont été immenses. Le document que nous avons mis à votre disposition en atteste.
C’est dans ce contexte très négatif que le Conseil a appelé à une feuille de route sur la dimension sociale de l’UEM. Nous avons salué la décision du Conseil européen de décembre 2012 de mettre la question de l’Europe sociale sur la table, parce que nous considérons qu’il y a là un écho à nos demandes.
Il est essentiel que la feuille de route sur la dimension sociale de l’UEM qui sera produite, et sans doute adoptée, en juin soit autre chose qu’un emplâtre sur une jambe de bois ; ou une feuille de vigne qui cache la nudité de l’Europe sociale.
Il est essentiel que la feuille de route sur la dimension sociale de l’UEM qui sera produite, et sans doute adoptée, en juin soit autre chose qu’un emplâtre sur une jambe de bois ; ou une feuille de vigne qui cache la nudité de l’Europe sociale.
La feuille de route doit traiter de la dimension sociale de l’UEM.
Oui, nous savons qu’une zone monétaire unique exige coordination et convergence, et que cela a un impact considérable sur les conditions de travail.
Mais où commence l’UEM et où finit-elle? L’austérité ne s’est pas arrêtée aux frontières de l’UE. Les politiques macroéconomiques mises en place par le pacte fiscal seront appliquées bien au-delà de la zone Euro.
Pour nous la dimension sociale de l’UEM devrait entraîner un processus social positif pour tous les pays de l’UE ; nous sommes opposés à ce que les pays non membres de l’Euro-zone rapatrient les droits sociaux au niveau national. Nous le savons, c’est ce que voudrait faire le premier ministre britannique et, derrière lui, d’autres gouvernements.
Un élément essentiel de mon message est le suivant : Le cœur du problème est que les politiques actuelles attaquent le tissu social, le capital social de nos sociétés ; il ne pourra y avoir aucune sérieuse feuille de route sur la dimension sociale de l’UEM s’il n’y a pas de changement d’orientation des politiques économiques.
Cette feuille de route doit indiquer très clairement que la priorité des priorités est de combattre le chômage, par un moratoire sur les politiques austéritaires et un programme d’investissement pour une croissance soutenable et pour l’emploi. Plus que jamais nous avons besoin d’une politique industrielle européenne qui fait cruellement défaut, politique qui doit être accompagnée d’une politique sociale active sur les restructurations.
Nous n’avons pas vu de mise en œuvre du plan de croissance décidé en juin 2012. Nous savons que le capital de la BEI a été augmenté de 10 milliards d’euro avec effet de levier. Mais où sont les projets ? Pour qui ? Comment? De toute façon le montant serait loin de suffire pour faire redémarrer la croissance ne Europe.
On nous dit qu’il n’y pas d’argent public disponible.
De l’argent public, il y en a eu pour sauver les banques ; et le prix est retombé sur les gens. Et ces gens, ces travailleurs ne comprendront jamais comment il se fait qu’on ait trouvé normal d’augmenter déficit et dette publique pour sauver les banques, mais qu’on refuse de faire un petit effort pour sauver les emplois.
Quant à la mobilisation de fonds privés : Qu’est-ce qui est fait pour arrêter l’évasion la fraude ou l’évitement fiscal ? Mille milliards d’Euros échappent chaque année aux finances publiques. Il est temps d’arrêter ce scandale. Chacun d'entre nous ici autour de cette table, cela nous coûte 2.000 euros par an
Sur le dialogue social : Nous saluons l’attention portée au dialogue social au niveau européen; mais attention, ce dialogue doit porter des fruits ; nous ne voulons pas être pris en otages du dialogue.
Un dialogue européen est conditionné par un dialogue solide au niveau national. L’affaiblissement ou la destruction même des relations sociales au niveau national est contraire aux fondamentaux de l’UE. Ce qui s’est passé en Grèce est contraire aux droits fondamentaux de l’OIT. En Roumanie, en Hongrie, les droits syndicaux et le dialogue social sont bafoués. Que dira la feuille de route à ce sujet ?
C’est d’abord au niveau national, dans la négociation sur des programmes de redressement que le dialogue social doit s’exercer. Dans de nombreux pays les conditions n’existent pas pour cela, tout simplement parce que le droit de négocier est combattu.
La feuille de route ne peut pas ignorer cela; parler du dialogue social européen sans observer ce qui se passe au niveau national serait une discussion artificielle et stérile.
De même ne pas donner le suivi nécessaire au dialogue social sectoriel au niveau européen (par exemple dans le secteur de la coiffure ou du transport), comme prévu par les traités enlève à ce dialogue sa raison d’être.
Je voudrais maintenant parler du dialogue social et de la participation de la CES au processus de gouvernance économique.
La CES est prête à s’impliquer dans l’élaboration des lignes générales du semestre européen ; avec les réserves suivantes : comment notre participation serait-elle organisée ? Notre participation pourrait-elle réellement infléchir l’orientation des politiques mises en place ? Le sommet social tripartite, ou le dialogue macro-économique peuvent-ils être transformés en plateformes qui iraient au-delà de l’échange intéressant et poli ?
Avec les employeurs, la CES a (conformément au programme de travail des partenaires sociaux adopté au printemps 2012) entamé des discussions à ce sujet, dans le but de dégager une vue commune, voire des recommandations. La prochaine réunion est prévue pour le 17 mai. Et nous partageons l'objectif de délivrer une contribution conjointe d'ici le Sommet de juin.
La réponse à ces questions est naturellement d’une importance capitale. La CES ne sera pas prise en otage d’une participation à la gouvernance économique.
En lien avec le processus de gouvernance économique entraîné par l’UEM, les coûts unitaires du travail sont comparés et discutés par les ministres des finances et les ministres de l’emploi. Et nous savons aussi que les salaires sont un élément important des coûts unitaires du travail. Nous rappelons cependant toujours que la compétitivité hors coût salarial (R&D, innovation, formation) reste un élément clé du succès économique d’un pays.
Nous touchons ici à une question ultrasensible ; un point de non-retour. Les systèmes de fixation des salaires ne peuvent être un domaine pour l’UE ou pour l’UEM ; il faut respecter l’autonomie des partenaires sociaux dans ce domaine.
Nous soutenons l’inclusion d’indicateurs sociaux dans les recommandations spécifiques par pays ; indicateurs tels que : chômage, pauvreté, inégalités, politiques actives du marché du travail. La mise en œuvre de la garantie-jeunes devrait être incluse dans ces recommandations spécifiques.
Ces objectifs sociaux doivent avoir une valeur au moins égale aux indicateurs économiques, ne pas faire figure de parent pauvre ou de simple option occasionnelle ; et, bien sûr, si on prend au sérieux les indicateurs sociaux, cela aura une influence sur les politiques macroéconomiques. Il est clair qu’on ne peut pas avoir deux piliers qui s’ignorent l’un l’autre : un pilier économique, qui ignorerait le pilier social. Un objectif social doit par conséquent avoir le pouvoir d’influencer le pilier économique.
Ces objectifs sociaux doivent avoir une valeur au moins égale aux indicateurs économiques, ne pas faire figure de parent pauvre ou de simple option occasionnelle ; et, bien sûr, si on prend au sérieux les indicateurs sociaux, cela aura une influence sur les politiques macroéconomiques. Il est clair qu’on ne peut pas avoir deux piliers qui s’ignorent l’un l’autre : un pilier économique, qui ignorerait le pilier social. Un objectif social doit par conséquent avoir le pouvoir d’influencer le pilier économique.
Quelques mots sur le dumping social ou salarial; il existe pratiquement partout dans l’UE ; il dresse les gens contre l’UE. Les dommages causés par les décisions de la cour de justice sur les cas Laval, Rüffert, Viking et Luxembourg n’ont pas été réparés. Aussi longtemps que l’UE laissera se développer le dumping social, elle sera vue comme un instrument opérant contre les intérêts de gens, et comme un facteur socialement négatif.
Je vous recommande la lecture attentive de notre déclaration sur la dimension sociale. Et je vous demande de la prendre très sérieusement.
J’en suis bien consciente, le Conseil européen est une assemblée fort difficile à influencer; it’s a hard nut to crack. Je sais que les pressions sont fortes pour confiner la discussion sur la dimension sociale à quelques éléments secondaires. Mais nous attendons de la Commission, et de vous Président, que vous preniez vos responsabilités en envoyant un message fort au Conseil. Car Si, fin juin, le Conseil produit une feuille de route sans envergure, ce sera infiniment dommageable. Le soutien syndical à l’intégration européenne pourrait bien, alors et malheureusement, s’évaporer.